Congo Actualité n. 162

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: Une tolérance complice

1. HUMAN RIGHTS WATCH ACCUSE LE M23 DE CRIMES DE GUERRE

2. LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE POUR LA RÉGION DES GRANDS LACS (CIRGL)

3. L’IMPOSSIBILITÉ DE NEGOCIATIONS ENTRE LE GOUVERNEMENT ET LE M23

a. Le M23 propose des négociations avec le Gouvernement

b. Les réactions de la Société Civile

4. LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

5. LE MINI SOMMET DE NEW YORK

 

EDITORIAL: Une tolérance complice

1. HUMAN RIGHTS WATCH ACCUSE LE M23 DE CRIMES DE GUERRE

Human Rights Watch dénonce encore le M23.

Le 11 septembre, dans un rapport publié depuis Goma (Nord Kivu), l’ONG internationale de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch (HWR) accuse les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) d’avoir tué, depuis le mois de juin dernier, au moins quinze civils et violé quarante six femmes et jeunes filles, dont une mineure de huit ans dans le territoire de Rutshuru (Nord-Kivu). Human Rights Watch a basé ses affirmations sur des entretiens que ses experts ont menés de mai à septembre, avec cent quatre vingt dix personnes, parmi lesquelles des victimes congolaises et rwandaises, des membres des familles de victimes, des témoins, des autorités locales, ainsi que des rebelles et anciens rebelles du M23.

Des témoins ont affirmé à Human Rights Watch qu’au moins trente trois nouvelles recrues et d’autres combattants du M23 avaient été sommairement exécutés alors qu’ils essayaient de s’enfuir. Certains avaient été ligotés et abattus devant les autres recrues à titre d’avertissement.

L’une des jeunes recrues a déclaré à Human Rights Watch: «Quand nous étions avec le M23, ils nous ont dit [que nous avions le choix] entre rester avec eux ou mourir. Beaucoup ont tenté de s’enfuir. Certains ont été retrouvés et pour eux, cela a été la mort immédiate». La chercheuse de Human Rights Watch, Ida Sawyer, a dénoncé ces crimes: «Les rebelles du M23 sont responsables de crimes de guerre commis à grande échelle en complicité avec certaines autorités rwandaises en raison de l’appui militaire continu qu’elles apportent aux forces de M23. Au moins six cent personnes étaient recrutées par force ou par ruse au Rwanda pour joindre le M23 et les recrutements ont continué jusqu’au mois d’août. Il y a aussi des officiers rwandais qui sont au Congo avec le M23 en train de former des nouvelles recrues dans les centres d’entrainement».

Des Congolais et des Rwandais vivant à proximité de la frontière, y compris des autorités locales, ont affirmé à Human Rights Watch qu’ils avaient observé de fréquents mouvements de troupes rwandaises vers et en provenance de RDCongo en juin, juillet, et août, «apparemment pour prêter main forte aux rebelles du M23». Ils ont précisé que les militaires de l’armée rwandaise utilisaient régulièrement un sentier proche de la colline de Njerima au Rwanda, non loin du volcan Karisimbi, pour franchir la frontière congolaise.

Le rapport de HRW indique qu’en plus du déploiement de renforts et de recrues pour appuyer des opérations militaires, des autorités militaires rwandaises ont fourni une importante assistance aux rebelles du M23 sous forme d’armes, de munitions et de formation. Ces actions font du Rwanda un État partie au conflit dans l’Est de la RDC, indique HRW dans son rapport.

Selon le rapport, «les commandants du M23 devraient être contraints de rendre des comptes pour ces crimes, et les autorités rwandaises qui soutiennent les commandants responsables d’exactions pourraient être traduits en justice pour complicité de ces crimes».

De leur côté, les responsables du M23 nient ces allégations. Selon le porte-parole militaire, le Colonel Vianney Kazarama, il s’agit de graves accusations non fondées.[1]

Et l’on parle de libération?.

Les déplacés de guerre affluent dans la ville de Goma et, dans le centre don Bosco, plus de 30% des femmes enceintes, faibles et mal nourries, meurent durant l’accouchement. Dans un autre centre, INUKA, les éducatrices, en trois jours seulement, ont accueilli plus de 90 enfants abandonnés. Leurs cas sont plus atroces les uns que les autres: Marie, recueillie par le CICR, n’a que onze mois. Sa maman avait fui le M23, le bébé attaché sur son dos. Dans la forêt, elle a croisé des guerriers Mai Mai, qui ont arraché l’enfant de son dos et se sont acharnés sur elle à l’arme blanche. Une autre petite fille, Sifa, 13 ans, venue du Masisi, a été violée à trois reprises par les militaires et aux éducateurs, elle a expliqué qu’elle voulait mourir. Une autre fillette, Zawadi, 14 ans, originaire du Masisi elle aussi, a également été violée par les militaires et, stigmatisée dans son quartier, elle a été obligée de fuir vers la ville.

Alors que les habitants de Goma constatent que les prix des produits de base ont explosé, les rebelles du M23 exigeant des péages exorbitants, ils s’estiment cependant privilégiés par rapport à leurs compatriotes qui vivent plus au Nord: selon Human Rights Watch, «les rebelles du M23 sont en train de commettre une horrible série de nouvelles atrocités». À Chengerero, le 7 juillet, des rebelles du M23 ont défoncé la porte d’une maison, enlevé le mari, battu à mort le fils de la famille. Quant à la femme, ils l’ont violée collectivement puis, après avoir répandu du carburant entre ses jambes, ils y ont mis le feu.

Selon les entretiens menés par HRW, le mouvement M23 (composé de soldats mutins qui avaient refusé d’être déplacés dans d’autres provinces du Congo) a procédé à des recrutements forcés: dans le territoire de Rutshuru, depuis juillet, 137 jeunes hommes et garçons ont été enlevés à leur domicile, au marché ou alors qu’ils se rendaient aux champs. Selon certains témoignages, des appels téléphoniques venus du Rwanda pressent les Tutsis du Congo de soutenir le M23, au nom d’intérêts communautaristes. Selon des déserteurs du M23, certaines recrues provenaient du Nord Kivu, mais la plupart d’entre eux était originaire du Rwanda: militaires démobilisés de l’armée rwandaise, anciens partisans de Laurent Nkunda, ex- combattants hutus des FDLR renvoyés au Congo pour l’occasion, et aussi jeunes réfugiés tutsis congolais se trouvant dans des camps à Kibuye, Buymba et aussi Nkamira.

Ces multiples récits et témoignages décrivent l’atmosphère de terreur régnant dans les zones occupées par le M23, confirment si besoin en était l’implication active du Rwanda aux côtés des mutins et infirment, avec force précisions, les dénégations du Rwanda assurant qu’il ne s’agît là que d’un problème entre ressortissants congolais.[2]

Les femmes, premières victimes de la guerre.

«Ils étaient dix, grands, petits, maigres, gros. Ils étaient dix, ils se sont relayés et chacun d’eux a pris possession de mon corps. Au début, je n’ai pas compris, c’était ma première fois, j’ai eu l’impression de mourir, j’aurais voulu disparaître, mais j’étais bien là ! Ils se sont engouffrés, le sang a giclé, je me sentais sale, j’avais honte. Aujourd’hui, j’erre dans la ville en espérant rencontrer la mort à un coin de rue…». Nzigire, Sifa, Mawouwa, Furaha, Neema, chacune a vécu la même expérience dans l’Est du Congo.

Le conflit perdure et le nombre de victimes ne cesse d’augmenter. Selon des estimations provenant d’organisations non gouvernementales (Amnesty International, Human Rights Watch) qui travaillent sur place, une centaine de femmes seraient violées chaque jour et utilisées comme esclaves sexuelles par les différentes rébellions qui ont comme objectif l’exploitation illégale des ressources minières. Chaque jour, le bilan ne cesse de s’alourdir. Les viols continuent, les populations civiles sont massacrées et la faune – une des plus riches de l’humanité, plusieurs espèces sont protégées – ainsi que la flore sont détruites. Et cela dure depuis vingt ans.

Aujourd’hui, une nouvelle rébellion sévit dans la région: le M23, Mouvement du 23 mars 2009, qui, selon un récent rapport des Nations unies, serait activement soutenu par le Rwanda. Le gouvernement congolais, quant à lui, reste incapable de défendre et de protéger sa population. L’armée congolaise passe plus de temps à racketter la population qu’à la protéger ou à faire la guerre à l’ennemi. Depuis 1999, les Nations unies disposent d’une force multinationale sur place (dont l’effectif atteint aujourd’hui plus de 19000 hommes), mais le résultat de son action reste mitigé et peu efficace.

Des milliers de villageois ont abandonné leurs habitations et vivent dans la forêt, des centaines de femmes continuent à être violées, des milliers d’enfants sont privés de toute éducation Et le monde se tait, les bourreaux restent impunis et protégés par leurs complices, les victimes se retrouvent abandonnées à elles-mêmes.

Le Conseil de sécurité doit condamner fermement le soutien du Rwanda aux différentes rébellions. Des sanctions financières et militaires doivent être prises contre ce pays pour le contraindre à arrêter ses interventions au Congo et à coopérer à l’arrestation des criminels de guerre protégés par Kigali et recherchés par la justice internationale.

L’Union européenne ainsi que l’ensemble de ses pays membres doivent geler l’aide destinée au Rwanda (à l’exception de l’aide humanitaire). Le retour de cette aide doit être conditionné à la fin du soutien rwandais à l’occupation de l’est de la RDC, ainsi qu’à l’arrestation des chefs rebelles qui sont protégés par Kigali et à leurs transferts devant la Cour pénale internationale pour répondre de leurs actes. Ces mesures sont nécessaires pour obliger l’armée rwandaise à arrêter ses multiples interventions au Congo. Des pressions doivent être faites sur le gouvernement congolais aussi pour la réforme de l’armée nationale, en vue de lui permettre de remplir correctement sa mission de protection de la population et de défense du territoire national.[3]

2. LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE POUR LA RÉGION DES GRANDS LACS (CIRGL)

Le 11 septembre, en visite dans la région des Grands Lacs, le secrétaire général adjoint des Nations unies chargé des opérations de maintien de la paix, Hervé Ladsous, a affirmé que l’Onu est prête à aider les Etats des Grands Lacs à matérialiser le projet du déploiement de la force internationale neutre, tout en soulignant qu’il faudrait pour cela «une véritable planification». Les modalités de financement de cette force n’ont toujours pas été précisées.[4]

Le 14 septembre, les experts militaires des pays membres de la Conférence internationale pour la région des Grands Lacs (CIRGL) se sont réunis à Goma (Nord-Kivu) pour préparer la mise en œuvre du mécanisme conjoint de vérification élargi à d’autres pays de la CIRGL. Cette structure est chargée de vérifier les allégations de Kinshasa sur la présence des soldats rwandais dans les rangs des rebelles du M23. Ce mécanisme de vérification vise également l’identification des troupes du M23 ainsi que d’autres groupes armés opérant dans l’Est de la RDCongo. Il aura aussi la charge de contrôler les mouvements à la frontière entre la RDC et le Rwanda.[5]

Le 16 septembre, à Goma (Nord Kivu), les ministres de la Défense des Etats membres de la CIRGL ont résolu la mise en place d’une équipe militaire d’évaluation pour préparer l’arrivée de la force internationale neutre à déployer le long de la frontière entre la RDC et le Rwanda. L’équipe militaire, dont la mise en place est fixée au 22 septembre prochain, devra évaluer, au cours d’un mois, la capacité militaire des forces et groupes armés opérant au Nord-Kivu, dont le M23 et les rebelles rwandais des FDLR. L’équipe militaire d’évaluation devra être composée d’au moins deux experts militaires de chacun des 11 Etats membres de la CIRGL.[6]

3. L’IMPOSSIBILITÉ DE NEGOCIATIONS ENTRE LE GOUVERNEMENT ET LE M23

a. Le M23 propose des négociations avec le Gouvernement

Selon le coordonateur politique du M23, Jean-Marie Runiga, le président ougandais et président en exercice de la CIRGL, Yoweri Museveni, « aurait pris contact avec les deux parties (gouvernement de la RDC et la rébellion du M23), pour entamer des négociations« . Toujours selon le M23, une délégation du mouvement rebelle serait déjà à Kampala et attendrait une délégation congolaise de haut niveau. Si Kinshasa a aussitôt démenti, on parle des deux présidents du Parlement de la RDCongo. Léon Kengo, le président du Sénat et Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale ont effectivement mis sur pied une cellule de « diplomatie parlementaire« , en vue d’appuyer la politique extérieure du pays pour mettre fin au conflit qui secoue l’Est de la RDCongo. Toutefois, il y a quelques mois, le président congolais Joseph Kabila avait déclaré vouloir résoudre cette crise par trois voies, dont celles politique, diplomatique et militaire, mais sans une négociation directe avec les rebelles du M23.[7]

Le 19 septembre, en occasion de la visite d’une délégation de la Conférence nationale épiscopale du Congo (Cenco) à la paroisse de Rutchuru, au Nord Kivu, les évêques ont rencontré les dirigeants du M23, conduits par le colonel Makenga Sultani. Au sortir de cette rencontre, le colonel Makenga a indiqué à la presse qu’ils avaient révélé aux évêques des vérités que ces derniers ne connaissaient pas au sujet de cette guerre. «Le M23 est prêt à négocier, si seulement le gouvernement l’acceptait», a-t-il poursuivi. Toutefois, ces négociations ne pourraient plus porter sur les seuls accords du 23 mars 2009, du fait que «les choses ont évolué», a souligné le mouvement rebelle, sans autres précisions.[8]

Le 19 septembre, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union Africaine (UA) a publié une déclaration sur la situation sécuritaire à l’Est de la RDCongo et le déploiement d’une Force internationale neutre dans cette région.

Le Conseil «réitère la préoccupation de l’UA face à la situation sécuritaire et humanitaire qui prévaut à l’Est de la RDCongo, son attachement au respect de l’unité et de l’intégrité territoriale de la RDCongo, ainsi que son rejet du recours à la rébellion armée, qui fait peser une grave menace sur la paix, la sécurité et la stabilité en RDCongo et dans la région, en même temps qu’elle compromet la viabilité du processus de démocratisation en cours dans ce pays. À cet égard, le Conseil exprime à nouveau sa ferme condamnation de l’action du M23 et de toutes les autres forces négatives se trouvant à l’Est de la RDCongo».

Le Conseil «souligne la nécessité d’efforts soutenus pour éradiquer la présence des forces négatives à l’Est de la RDCongo, restaurer effectivement l’autorité de l’État et promouvoir durablement la paix, la sécurité et la stabilité dans cette région, y compris à travers la mise en œuvre effective de l’Accord de Goma du 23 mars 2009 entre le gouvernement de la RDCongo et le Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP), sur la base d’une évaluation exhaustive des progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations des anciens envoyés spéciaux conjoints de la CIRGL, de l’UA et des Nations Unies, les anciens présidents Benjamin Mkapa et Olusegun Obasanjo».

Le Conseil «se félicite des efforts que déploient les pays membres et le secrétariat exécutif de la CIRGL pour trouver une solution durable à la situation qui prévaut à l’Est de la RDCongo. À ce propos, il souligne en particulier l’importance que revêtent l’opérationnalisation intégrale du Mécanisme conjoint de vérification (MCV) élargi, ainsi que la décision de constituer et déployer une force internationale neutre».[9]

Il faut noter que ce communiqué se limite juste à condamner l’action du M23 et de toutes les forces négatives actives sur le terrain. En ignorant tous les rapports, dont celui publié par l’Organisation des Nations Unies et relayé par plusieurs ONG internationales, notamment Human Rights Watch, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA n’a pas daigné condamner le soutien apporté par le Rwanda au M23, force négative qui est à la base de la nouvelle vague d’insécurité qui sévit dans l’Est de la RDCongo. En lieu et place de contraindre le Rwanda à arrêter son soutien au M23, le Conseil de sécurité contourne cette évidence et met Kinshasa devant un fait accompli: cesser d’incriminer son voisin rwandais et négocier avec le M23. Autrement dit, la RDCongo est renvoyée à la case départ, celle de la mise en œuvre effective de l’accord du 23 mars 2009 signé à Goma dans la province du Nord-Kivu. Tout compte fait, c’est Kinshasa qui se trouve perdant sur toute la ligne, le Rwanda étant parvenu à se dédouaner de son implication dans la situation d’insécurité qui prévaut dans l’Est et à aligner l’UA à sa cause.[10]

Certains analystes voient dans la déclaration du Conseil de sécurité et de paix de l’UA un net recul, d’autant plus que les accords du 23 mars 2009 ont été signés avec le CNDP mué, entre-temps, en parti politique affilié à la Majorité présidentielle.[11]

Il est paradoxal que dans son communiqué, l’Union Africaine soutienne à la fois une chose (traque de la rébellion armée du M23) et son contraire (évaluation de l’Accord du 23 mars 2009).
S’il y a effectivement une volonté affirmée de mater ce mouvement rebelle par les armes, l’évaluation de l’Accord du 23 mars devrait être automatiquement exclue, d’autant plus que l’actuel M23 n’en est pas signataire. L’UA donne l’impression de condamner la rébellion congolaise tout en lui ouvrant une brèche, celle de la participation à un nouveau round de négociations avec le gouvernement de Kinshasa. D’autre part, en acceptant le principe de «l’évaluation exhaustive» de l’Accord du 23 mars 2009 signé entre le gouvernement congolais et le CNDP (Congrès National pour la Défense du Peuple), la délégation congolaise a implicitement apporté sa caution au M23. Par conséquent, il est désormais permis aux responsables politiques et militaires de ce mouvement rebelle de revendiquer, en lieu et place du CNDP, tous let droits reconnus par Kinshasa à l’ancienne rébellion animée par l’ancien général Bosco Ntaganda.[12]

Le 21 septembre, le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku Kahongya, a indiqué que «le gouvernement congolais s’est efforcé de respecter scrupuleusement les accords du 23 mars 2009 signés avec le CNDP. Au contraire, c’est le CNDP qui, bien qu’accepté et enregistré légalement comme parti politique et en dépit de l’intégration politique et militaire de ses cadres, n’a pas tenu ses promesses». «Des officiers issus de ce groupe ont été intégrés avec leurs grades dans les rangs des FARDC. La loi d’amnistie a été votée et promulguée, les prisonniers politiques libérés. Ses cadres politiques ont été placés dans l’administration publique. A titre d’exemple, un cadre CNDP a été nommé administrateur à Kalehe, un autre à Sekebanza et deux autres comme assistants à Nyiragongo et à Masisi, en plus d’un ministre nommé au sein du gouvernement provincial, qui a quitté son poste pour rejoindre le M23. Malheureusement, le CNDP, foulant au nez et aux pieds le même accord qu’il prétend ironiquement défendre, a fait recours à la lutte armée, sous la bannière du M23», a-t-il fait remarquer.

Par ailleurs, le M23 met en avant – comme l’indique son cahier des charges remis au président ougandais Yoweri Museveni (président en exercice de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs) – le mandat d’arrêt contre Bosco Ntaganda et la question des élections de novembre 2011. «Des alibis, somme toute et qui suscitent beaucoup d’interrogations. Que viennent faire les élections de novembre, postérieures à l’Accord du 23 mars 2009? En outre, en voulant mordicus défendre Bosco Ntaganda contre les poursuites judiciaires de la CPI, cela dénote une contradiction chez les rebelles. Car, l’on sait tous que Sultani Makenga, coordonnateur militaire du M23 et plusieurs autres officiers du M23, ont toujours nié être avec le général déchu Bosco Ntaganda», s’est étonné le gouverneur de province. Il a relevé «des contradictions qui prouvent à suffisance que le M23 monté à la va-vite n’a rien de concret comme revendications et qu’il n’est que la face cachée de l’iceberg dont le Rwanda détient seul le secret de la vraie image». Pour lui, «aucune négociation n’est envisagée avec le M23 comme le prétendent ses dirigeants. Cette idée des pourparlers est totalement exclue».[13]

b. Les réactions de la Société Civile

Le 5 septembre, dans un courrier adressé au vice-président pour l’Afrique de la Banque mondiale, l’ONG des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW) a demande à cette institution de revoir son aide au Rwanda. Pour cette ONG internationale, le pays dirigé par Paul Kagame ne devrait plus bénéficier de l’aide de la Banque Mondiale à cause des atteintes aux droits humains commises sur son territoire et de son soutien aux rebelles du M23 qui commettent des violences dans l’Est de la RDCongo. La Banque mondiale apporte une aide de plus de 100 millions de dollars chaque année pour soutenir le budget général du Rwanda, explique cette ONG. Cependant, ces acquis sont sapés par la répression politique, les violations systématiques des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion de la part du gouvernement Rwandais, regrette HRW. Plus graves encore, toujours selon cette ONG, l’armée rwandaise continue à soutenir des groupes rebelles armés auteurs d’exactions en RDCongo. Cette ONG accuse également le Rwanda de soutenir Bosco Ntaganda, initiateur du M23 et visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale. Human Rights Watch demande donc à la Banque Mondiale de revoir tous ses programmes de financement destinés au Rwanda, afin de s’assurer que les fonds qui lui sont accordés ne contribuent pas aux atteintes aux droits humains.[14]

Le 17 septembre, dans une lettre ouverte adressée au président en exercice de la CIRGL, Joweri Museveni, une vingtaine d’organisations féminines ont dit non aux négociations entre le gouvernement congolais et les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23).

Les femmes du Nord Kivu dénoncent le fait que la CIRGL banalise l’agression de la RDCongo par le Rwanda, d’autant plus que les sommets qu’elle a organisés notamment à Addis-Abeba, à Kampala au mois d’août et au mois de septembre et autres rencontres de haut niveau des Ministres de la Défense et Chefs d’État Major ne font que laver les crimes commis par le Rwanda sur le sol congolais. La CIRGL ne parle que du M23 et ne fait pas allusion au Rwanda qui le chapote. La CIRGL  ne tient pas compte du rapport des experts des Nations Unies qui confirme le soutien du Rwanda au groupe rebelle en RDCongo.

Ce rapport, qui dit tout haut ce que la population di tout bas, prouve que le Rwanda fournit les armes, facilite et assure la logistique du M23 à partir de son territoire. Le Rwanda recrute les enfants et les réfugiés et recycle les ex combattants du FDLR pour le compte du M23. Le Rwanda est devenu un refuge des criminels de guerre recherchés par la Cour Pénale Internationale (CPI).

L’armée rwandaise intervient directement sur le territoire congolais pour renforcer le M23.

Par ces faits, la CIRGL  encourage l’agresseur dans ses crimes, car elle ne le cite pas nommément pour lui demander de cesser les violences qu’il commet sur les populations congolaises depuis des années. Ces mouvements de guerre à répétition sont venus accentuer le désastre commencé depuis 1994, lors de l’entrée massive des réfugiés rwandais sur le territoire congolais. En agressant la RDCongo, le Rwanda, membre de la CIRGL, viole le protocole de non agression et de défense mutuelle des États membres de la CIRGL.

On ne peut pas ignorer les solutions malheureuses, prises dans le passé, visant à intégrer dans les institutions du Pays, dans la police et dans l’armée nationale, les membres et les militaires issus des groupes rebelles. Dans cette logique et suite aux accords du 23 mars 2009 entre le Gouvernement et le CNDP, tous les postes stratégiques, grades et fonctions, de la province du Nord Kivu au sein de l’armée ont été donnés aux membres du RCD/CNDP par le gouvernement congolais. A titre d’exemple, sur 13 régiments qui étaient institués, 11 étaient commandés par les membres du CNDP. Aujourd’hui encore, les membres du RCD/CNDP sont à la tête de toutes les unités au sein de l’armée. Cette structure de commandement facilite la défection rapide des éléments de ce mouvement, devenu M23.

Compte tenu de ces faits, les femmes des organisations féminines du Nord Kivu s’opposent à toutes les démarches de la CIRGL qui iraient dans le sens d’amener le gouvernement congolais à négocier avec le M23. En effet, la négociation du gouvernement congolais avec le M23 donnerait au M23 et au Rwanda, qui le soutient, un pouvoir maximum dans notre pays, piétinant ainsi la souveraineté nationale de la RDCongo. La négociation donnerait une fois de plus des postes de responsabilité aux membres du M23 et à d’autres citoyens rwandais dans le gouvernement, dans l’armée et dans la police nationale en RDCongo. La négociation encouragerait la naissance de nouveaux groupes armés et renforcerait les anciens, étant donné qu’en RDCongo le seul moyen confirmé pour accéder au pouvoir sera la rébellion. La négociation donnerait de nouveaux postes de responsabilité aux criminels, assurant une fois de plus leur impunité et violant les principes de la démocratie et de la justice.

Les efforts diplomatiques entrepris au sein de la CIRGL auprès des parties en conflit dans l’Est de la RDCongo, le gouvernement congolais et le M23 appuyé par le Rwanda, n’est rien d’autre qu’une démarche vers des négociations qui pourraient conduire vers un processus de balkanisation de la RDCongo au profit du Rwanda, ce que la population congolaise déplore et rejette. La CIRGL devrait plutôt demander au Rwanda de cesser immédiatement son soutien au M23 et ordonner à ses citoyens envoyés dans les rangs du M23 de libérer immédiatement le territoire congolais qu’ils occupent.[15]

Le 19 septembre, une délégation de la Conférence nationale épiscopale du Congo (Cenco) s’est rendue à la paroisse de Rutchuru, au Nord Kivu.

Le message de la Cenco aux populations de Rutshuru a été lu publiquement par Monseigneur Valentin Masengo, évêque de Kabinda et chef de cette délégation. Des sources proches de cette délégation ont résumé ce massage en ces termes: «La guerre du M23 est injuste et injustifiée. La RDC reste indivisible. Les ressources minières de la RDC ne devraient pas faire l’objet d’une exploitation illégale par quelque homme armé que ce soit». La Cenco a, par ailleurs, lancé un appel au peuple congolais pour dénoncer toute tentative de balkanisation du pays.

Ainsi, après la messe, les évêques ont rencontré les dirigeants du M23, conduits par le colonel Makenga Sultani. Après cette rencontre, les évêques n’ont fait aucun commentaire. Ils ont juste indiqué qu’ils iraient faire rapport à l’assemblée générale de la Cenco qui les a mandatés pour cette mission. Au total, quatre paroisses catholiques du territoire de Rutshuru sont sous le contrôle du M23. Il s’agit de paroisses de: Karambi, Jomba, Rugari et Rutshuru.[16]

4. LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

Le 11 septembre, le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, s’est déclaré «convaincu» d’une implication, directe ou indirecte, du Rwanda dans ce qui se passe dans l’Est de la RDCongo. Didier Reynders a ainsi appelé Kigali à collaborer afin de mettre fin à la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23). «Le Rwanda doit condamner la rébellion (du Mouvement du 23 mars, M23) de façon explicite et participer à l’action pour y mettre fin en cessant tout soutien», a-t-il affirmé devant les commissions des relations extérieures du Sénat et de la Chambre à Bruxelles. M. Reynders a ajouté qu’il a une nouvelle fois répété ce message à son homologue rwandais, Louise Mushikiwabo, qu’il a rencontrée une nouvelle fois le10 et 11 septembre à Bruxelles (Belgique).[17]

Le 18 septembre, le secrétaire général adjoint des Nations unies chargé des opérations de maintien de la paix, Hervé Ladsous, a qualifié d’«inacceptable» l’administration parallèle que les rebelles du M23 ont installée dans la partie du Nord-Kivu qui se trouve sous leur contrôle. Il s’est exprimé ainsi à New York, au sortir d’une réunion du Conseil de Sécurité où il a rendu compte de sa dernière visite en RDCongo, au Rwanda et en Ouganda. Devant la presse, Hervé Ladsous a décrit la situation qui prévaut à Rutshuru, la zone occupée par le M23. «Les éléments du M23 sont concentrés dans un coin à l’Est du Kivu, près des frontières du Rwanda et de l’Ouganda. C’est à Rutshuru. Et à partir de cette position ils ont entre temps mis en place une administration de facto qui contrôle la population, prélève des ‘taxes’ sur la circulation. Ce qui est inacceptable», a-t-il déclaré, en ajoutant, toutefois,  qu’«il n’y a pas eu d’offensives militaires majeures au cours des cinq ou six dernières semaines». Cependant, il a estimé qu’il fallait multiplier des efforts pour consolider la trêve observée jusqu’ici sur le terrain des opérations: «Clairement [la situation] peut changer très rapidement et cela dans plusieurs directions. Ils [rebelles du M23] peuvent décider de rentrer dans leurs anciennes positions à Masisi ou ils peuvent décider de bouger vers Goma, au Sud. C’est pourquoi nous devons travailler pour consolider la situation et faire beaucoup de progrès dans le sens du cessez-le-feu. C’est la priorité».[18]

Le 18 septembre, concernant le mini-sommet sur la RDCongo que le secrétaire général de l’Onu a convoqué pour le 27 septembre à New York, le secrétaire général adjoint des Nations unies chargé des opérations de maintien de la paix, Hervé Ladsous, a déclaré que trois préoccupations seraient au centre de cette rencontre à laquelle les dirigeants des Grands Lacs sont conviés. «La première [préoccupation] est que la violence doit cesser aux Kivus, dans l’Est de la RDC. Deuxième préoccupation, la souveraineté de la République démocratique du Congo doit être respectée. Troisièmement, il faut clairement rebâtir la confiance particulièrement entre les deux principaux voisins, la RDC et le Rwanda», a-t-il fait savoir.

Pour sa part, l’ambassadeur allemand à l’Onu, Peter Wittig, qui préside le Conseil de sécurité, a affirmé que «les membres du Conseil de sécurité sont d’accord pour considérer qu’une solution politique à la crise est une priorité absolue». «Je détecte une volonté de renforcer le dialogue politique et de ne pas se focaliser sur des sanctions à l’heure actuelle», a-t-il poursuivi estimant que «le dialogue, le renforcement de la confiance et de la coopération entre Kigali et Kinshasa sont nécessaires d’urgence pour traiter des racines du conflit».[19]

Le 26 septembre, le porte-parole du service diplomatique européen, Michael Mann, a annoncé que l’Union Europénne a décidé de suspendre tout nouveau projet d’aide au gouvernement rwandais. Ceci en attendant que soit clarifiées les allégations sur son soutien aux rebelles du M23. Le montant de l’aide suspendue se monte à plusieurs dizaines de millions d’euros. La suspension ne touchera pas les aides destinées à lutter contre la pauvreté, mais les budgets alloués au gouvernement rwandais, notamment pour l’aide au développement.

L’ambassadeur de l’UE en RDCongo, Jean-Michel Dumond, a déclaré que «Il s’agit de faire comprendre très clairement à nos amis rwandais qu’ils doivent explicitement condamner le M23, qu’ils doivent travailler avec le groupe d’experts des Nations unies et qu’ils doivent faire en sorte que cessent toutes interférences et ingérences dans les affaires internes congolaises». Jean-Michel Dumond a aussi appelé les présidents rwandais et congolais à discuter dans un esprit de coopération pour apporter des solutions définitives au problème de la rébellion dans l’Est de la RDCongo.

Dans l’opinion congolaise, toutes ces condamnations sont saluées. Mais l’on veut davantage dépasser l’étape du déjà-entendu. Car, très souvent, à ces suspensions tapageuses succèdent en sourdine des reprises ou poursuites d’aide qui confortent le régime de Kigali dans ses visées hégémonistes sur la RDCongo. Cas du Royaume-Uni qui est revenu sur l’annonce des sanctions contre le Rwanda pour des raisons qui n’ont pas convaincu l’opinion congolaise. Les Congolais attendent de tous les partenaires, surtout de la 67ème Assemblée générale des Nations unies, des sanctions claires et fermes à l’endroit du régime de Kigali. Les deux exigences du moment sont, à savoir le respect de la souveraineté de la RDC et la disparition du M23.[20]

5. LE MINI SOMMET DE NEW YORK

Le 24 septembre, la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton a rencontrés Joseph Kabila et Paul Kagame à New York, avant la 67ème Assemblée générale de l’ONU et a essayé de les amener à «négocier pour mettre fin au conflit des rebelles de l’Est de la RDCongo». La ministre a souligné «la nécessité d’un dialogue honnête et nourri entre les deux pays afin de parvenir à un règlement politique». Elle a souligné que toute solution passerait par «la traduction devant la justice des chefs du M23 et que les deux pays devaient s’engager à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’autre».[21]

Le 25 septembre, du haut de la tribune des Nations unies, le président français François Hollande a condamné fermement et ouvertement le Rwanda par rapport à la situation de guerre qui prévaut dans l’Est de la RDCongo. Naturellement, il s’est basé sur tous les rapports en circulation, notamment celui des experts des Nations unies, pour rappeler l’implication du régime de Kigali dans la situation d’insécurité créée par le M23.[22]

Le 25 septembre, lors de la 67ème session ordinaire de l’Assemblée Générale des Nations-Unies les présidents du Rwanda et de la RDCongo, Paul Kagamé et Joseph Kabila, se sont tous les deux exprimés à la tribune de l’ONU. Mais chacun a évité de parler du conflit qui les divise au Kivu. On attendait une passe d’armes sur la question du Kivu à la tribune de l’ONU, mais les deux hommes l’ont soigneusement évitée.

Le président rwandais Paul Kagame s’est contenté d’un discours très général sur la résolution des conflits. Il n’a pas évoqué la situation en RDCongo, ni les relations tendues avec l’ONU après le rapport d’experts qui accuse Kigali de soutenir les rebelles du M23.

Le président congolais Joseph Kabila a parlé des «ennemis de la paix» et de leurs «soutiens extérieurs» qui agissent au Kivu, mais il s’est bien gardé de prononcer le nom du Rwanda.

Il a d’abord rappelé que «l’histoire universelle démontre la validité opérationnelle du principe du règlement pacifique des différends internationaux. Elle nous enseigne aussi que, pour demeurer crédibles comme voies de résolution des conflits, le dialogue et la négociation doivent se faire dans la vérité et le respect de la loi, des valeurs et des principes universellement admis».

Il a ensuite évoqué la situation qui prévaut dans la RDCongo, où «des milliers d’enfants, de femmes et d’hommes sont privés de la paix par une force négative bénéficiant du soutien extérieur. Des enfants sont privés d’écoles et forcés de porter et d’utiliser les armes à feu pour tuer leurs semblables, voire leurs propres frères et sœurs. Cette situation est inacceptable. Elle mérite d’être condamnée et devrait donner lieu à des sanctions. Nous attendons de la Communauté des Nations qu’à cet égard elle prenne ses responsabilités, et du Conseil de Sécurité qu’il fasse respecter ses résolutions. C’est la condition de leur efficacité et de leur crédibilité».

Il a enfin reconnu que «c’est à nous, Congolais, qu’il revient de défendre notre patrie et d’assurer l’ordre public et la sécurité sur l’ensemble du territoire national. Nous sommes déterminés à assumer cette responsabilité et entendons y consacrer toutes nos ressources humaines, matérielles et financières, quitte à sacrifier nos ambitions légitimes pour l’émergence du Congo. Nous demeurons également déterminés à garantir la cohésion nationale et à assurer une égale protection à tous les citoyens congolais».[23]

Le 26 septembre, le Premier ministre belge Elio Di Rupo a pris la parole devant l’Assemblée générale de l’ONU à New York. Il a notamment demandé plus d’attention pour le conflit dans l’Est de la RDCongo. «La recrudescence de la violence ces derniers mois et la rébellion du M23, sont une grande préoccupation pour le gouvernement belge, en particulier en raison de l’impact grave sur les populations locales», a dit Di Rupo, évoquant les massacres, les viols, les pillages… «Tout cela est totalement insupportable». Les pays de la région doivent intensifier leurs efforts pour mettre fin à la rébellion, tandis que dans le même temps il faut résoudre les causes profondes de l’instabilité dans les Grands Lacs, a-t-il indiqué. Di Rupo s’est aussi adressé directement au Congo et au Rwanda, bien que ce dernier pays n’ait pas été directement nommément cité. «L’intégrité territoriale de la RDCongo doit être respectée. Tout soutien extérieur aux mutins doit cesser». Il a encouragé les autorités congolaises à mettre en oeuvre les réformes nécessaires, surtout celle de l’armée et de la police, afin de rétablir l’Etat de droit sur l’ensemble du territoire, dont l’Est du Pays.[24]

Le 27 septembre, le président de la RDCongo, Joseph Kabila et celui du Rwanda, Paul Kagame ont participé au mini-sommet convoqué par le secrétaire général de l’Onu à New-York pour résoudre la crise sécuritaire dans l’est de la RDCongo.

«Je suis très préoccupé par les allégations régulières concernant un soutien extérieur à la rébellion du M23. J’appelle tous les responsables à cesser ce soutien», a déclaré Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’Onu dans son discours d’ouverture de ce mini-sommet. «La souveraineté et l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo sont inviolables et doivent être respectées par tous ses voisins», a précisé Ban Ki-moon qui a rappelé le lourd tribut que continue à payer les civils dans ce conflit déclenché par les rebelles du M23. Ban Ki-Moon s’est dit «profondément préoccupé par les informations sur les violations des droits de l’homme perpétrées par le M23» et, rappelant le sens qu’il faut donner à cette importante réunion, il a indiqué qu’une solution politique était attendue à l’issue de ces assises.

Dans leurs discours lors de la réunion à huis clos, les deux présidents n’ont pas infléchi leurs positions. Joseph Kabila a réitéré que son pays est victime d’ingérences extérieures et il a, une nouvelle fois, demandé le déploiement d’une force neutre pour sécuriser la frontière entre l’est de la RDCongo et le Rwanda, un projet encore à l’étude. Paul Kagame a demandé que le Rwanda ne soit pas pris pour le bouc émissaire. Kinshasa accuse Kigali de soutenir le M23 mais Kigali nie toute implication dans cette rébellion.[25]

Sur les trois heures qu’a duré la réunion, Paul Kagame n’est resté qu’un peu plus de 45 minutes. Il est sorti pendant l’intervention du ministre belge Didier Reynders au moment où ce dernier demandait au Rwanda de condamner publiquement le M23.

Le mini sommet s’est achevé sans une déclaration finale commune des participants. Le Rwanda a bloqué son adoption, en refusant que soit mentionnée la condamnation des «soutiens extérieurs» du M23 et de cinq officiers de la rébellion. Plutôt qu’une déclaration commune, c’est un compte-rendu des différentes interventions qui a été publié:[26]

«– Les participants ont sévèrement condamnés le M23, ainsi que leurs attaques contre la population civile, les casques bleus des Nations Unies et les acteurs humanitaires. Les participants ont appelé le M23 et autres forces négatives à cesser immédiatement toutes les formes de violence, y compris les actes de violence sexuelle, le recrutement et l’utilisation d’enfants, ainsi que l’établissement d’administrations parallèles.

– La plupart des participants ont condamné toutes formes de soutien extérieur au M23 et aux autres forces négatives opérant en RDC, et ont exigé que tout soutien cesse immédiatement et définitivement. Ils ont demandé à ce que les dirigeants du M23 soient tenus responsables des violations du droit international humanitaire, en particulier les commandants impliqués dans la commission d’atrocités par le passé.

– Les participants ont également convenu que le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la RDC était un principe intangible et était d’une importance vitale pour la paix et la sécurité régionale et internationale.

– Les participants ont noté la nécessité de poursuivre une voie politique afin d’arriver à une solution durable, notamment par le biais d’un dialogue renforcé, et ont accueilli favorablement des efforts supplémentaires, au besoin, de médiation sur le plan régional et international. Ils ont, en particulier, insisté sur l’urgence d’un engagement et d’un dialogue constructifs entre la RDC et le Rwanda.

– Les participants ont également noté avec intérêt la décision de la CIRGL et de l’UA concernant le déploiement d’une « force internationale neutre ». Ils attendent le rapport de l’Equipe d’évaluation militaire de l’UA et de la CIRGL qui vise à évaluer les capacités militaires des forces négatives opérant au Nord Kivu, y compris M23 et FDLR.

– Les participants ont souligné la responsabilité qui incombe en premier lieu au gouvernement de la RDC pour ce qui est du renforcement de l’autorité de l’Etat dans l’est du pays, notamment à travers une reforme efficace du secteur de la sécurité, en particulier la réforme de l’armée, la fin de l’impunité pour les violations des droits de l’Homme, et ont encouragé le gouvernement de la RDC dans ses efforts visant à résoudre des questions telles que l’exploitation illégale des ressources naturelles».[27]

Du côté belge, on s’interroge sur les intentions de Kigali. «Si des femmes de l’est du Congo vous parlent de viol, de mutilation ou du meurtre de toute une famille, il est clair qu’arrêter la rébellion doit être une priorité absolue. Mais Kigali veut d’abord régler les ‘grands problèmes’ de la région, sans vraiment expliquer ce dont il s’agit réellement», a dit M. Reynders à la presse. «Ce qui manque clairement du côté rwandais, c’est la volonté politique», a-t-il ajouté.

L’ONG internationale Human Rights Watch a estimé que «le sommet a échoué à reconnaitre clairement le problème principal qui est la poursuite du soutien militaire du Rwanda au M23».

«Tant que le Rwanda continuera à soutenir la rébellion, les civils congolais supporteront les conséquences des combats, quel que soit le nombre de sommets que l’ONU tiendra», indique Human Rights Watch dans un communiqué.[28]

Le 22 septembre, John Mpaliza et ses compagnons de route sont finalement arrivés à Bruxelles, après un voyage d’environ 1.600 km à partir de Reggio Emilia (Italie), pour dénoncer les millions de morts, victimes de la guerre dans la République Démocratique du Congo. Tout au long de la route, ils ont rencontré des citoyens des différents pays traversés, des administrateurs locaux, des parlementaires et des Congolais de la diaspora.[29]

 

Le collectif « Tous Ensemble pour la paix en RDC », la plate-forme Afrique centrale du CNCD-11.11.11 ainsi que plusieurs acteurs de la société civile se mobilisent pour que la Belgique, l’Union européenne et la communauté internationale s’engagent en faveur de la paix au Congo.

Dans un communiqué, ces organisations annoncent une grande marche silencieuse prévue le samedi 6 octobre 2012 à Bruxelles, en solidarité avec toutes les victimes de la guerre au Congo.


[4] Cf Radio Okapi, 16.09.’12

[5] Cf Radio Okapi, 14.09.’12

[6] Cf Radio Okapi, 16.09.’12

[7] Cf Christophe Rigaud – Afrikarabia, 18.09.’12

[8] Cf Radio Okapi, 20.09.’12

[11] Cf Alain Diasso – Les Dépêches de Brazzaville – Kinshasa, 24.09.’12

[12] Cf Kimp – Le Phare –Kinshasa, 24.09.’12

[14] Cf Radio Okapi, 26.09.’12

[15] Correspondance particulière

[16] Cf Radio Okapi, 20.09.’12

[17] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 13.09.’12

[18] Cf Radio Okapi, 20.09.’12

[19] Cf Radio Okapi, 20.09.’12

[20] Cf Deutsche Welle – Bruxelles, 26/09/2012 (via mediacongo.net); Radio Okapi, 26.09.’12

[21] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 27.09.’12

[22] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 26.09.’12

[23] Cf Digitalcongo, 26.09.’12 http://www.digitalcongo.net/article/86854; Karim Lebhour – RFI -New York, 26.09.’12

[24] Cf Belga – New-York, 27.09.’12 / via mediacongo.net

[25] Cf Radio Okapi, 27.09.’12

[26] Cf Karim Lebhour – RFI, 27.09.’12 ; Radio Okapi, 28.09.’12

[28] Cf Karim Lebhour – RFI, 27.09.’12 ; Radio Okapi, 28.09.’12