Congo Actualité 338

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: QUAND ON VIOLE LA LIBERTÉ DE MANIFESTATION

  1. INTERDICTION ET RÉPRESSION DE MANIFESTATIONS, MEETINGS ET MATINÉES POLITIQUES
    1. Une matinée politique de l’Union Démocratique Africaine (UDA-O) interdite à Kinshasa
    2. Un meeting de Félix Tshisekedi interdit à Lubumbashi
    3. Une « Ville morte » dégénérée à Goma
  2. L’UNC DE VITAL KAMERHE A ANNONCE SON RETRAIT DU GOUVERNEMENT TSHIBALA

 

ÉDITORIAL: QUAND ON VIOLE LA LIBERTÉ DE MANIFESTATION

 

 

 

 

1. INTERDICTION ET RÉPRESSION DE MANIFESTATIONS, MEETINGS ET MATINÉES POLITIQUES

 

a. Une matinée politique de l’Union Démocratique Africaine (UDA-O) interdite à Kinshasa

 

Le 21 octobre, une matinée politique de l’Union Démocratique Africaine (UDA-O), parti de l’Opposition, a été interdite dans la Commune de Kasa-vubu. Un dispositif policier a été déployé devant la salle Félicité et les militants interdits d’accès.

Le président du parti, Claudel Lubaya, a affirmé: «Pour une manifestation dans une salle, la loi ne prévoit ni information, ni autorisation, c’est comme une messe, comme un deuil, c’est comme un mariage, c’est une manifestation en lieu fermé. L’UDA avait organisé sa matinée politique conformément aux lois de la République. Malheureusement ce matin ceux qui gèrent la salle nous ont informés avoir reçu l’ordre de la bourgmestre de la commune et de l’Agence Nationale de Renseignement de ne pas nous laisser organiser notre manifestation, sous prétexte de ne pas avoir écrit pour solliciter l’autorisation, alors que la loi ne prévoit ni information, ni autorisation pour une manifestation en un lieu fermé. C’est depuis 7h que la police est devant la salle pour empêcher l’accès». Cette matinée politique devait être axée sur les actions prévues par l’UDA et le Rassemblement jusqu’à la fin de l’année et sur la réaction de l’Opposition par rapport au délai supplémentaire de 504 jours proposé par la CENI.

Finalement, l’UDA-O a pu poursuivre son activité politique au siège du parti, à environ une demi-heure de marche du lieu où elle était prévue initialement.

L’UDA originelle dit ne plus croire à la tenue des élections et pense que les choses ne pourront avancer au pays qu’avec le départ du président Joseph Kabila. Pour le nouveau secrétaire général de l’UDA, Patrick Nsakala, le pouvoir actuel s’arrête le 31 décembre 2017: «Pour que les choses marchent bien dans ce pays, il faut faire les choses sans Kabila. C’est pourquoi nous avons dit, au 31 décembre, les choses s’arrêtent avec Kabila».[1]

 

b. Un meeting de Félix Tshisekedi interdit à Lubumbashi

 

Le président du Rassemblement de l’Opposition, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, était attendu le lundi 23 octobre à Lubumbashi, mais le maire de la ville, Jean Oscar Sanguza, lui a interdit d’y tenir le meeting prévu. «Le maire de Lubumbashi, Monsieur Jean Oscar Sanguza Mutunda, rappelle au public pour la enième fois qu’aucune manifestation à caractère public ne peut être organisée sans l’autorisation écrite de l’autorité urbaine avec accusé de réception, sept jours avant», dit le communiqué signé par le Maire de la ville de Lubumbashi, Jean Oscar Sanguza. Ce document rappelle que même les caravanes motorisées, marche, procession et tous les rassemblements populaires sont concernés par cette mesure. Cette décision intervient après la deuxième lettre du Rassop Grand Katanga sollicitant la tenue d’un meeting par Felix Tshisekedi, á la Place Square Forest.[2]

 

Le 21 octobre, loin de se soumettre à ce qu’il considère comme une violation des textes légaux, le coordinateur du Rassop Grand Katanga, Gabriel Kyungu wa Kumwanza, a annoncé que le programme de l’accueil de Félix Tshisekedi sera intégralement respecté. Il l’a dit dans une correspondance au maire de la ville ainsi qu’au cours d’une conférence de presse tenue à Lubumbashi.[3]

 

Le 22 octobre, plusieurs membres de l’opposition (28 selon la police, 48 selon leur parti), ont été arrêtés à Lubumbashi alors qu’ils participaient à une réunion pour préparer l’arrivée de Félix Tshisekedi. Selon le gouverneur du Haut-Katanga, Pande Kapopo, les personnes arrêtées l’ont été dans la rue, alors que les dispositions en vigueur depuis plusieurs mois conditionnent toute manifestation publique à une autorisation de l’autorité municipale. L’opposition, elle, accuse les policiers d’avoir procédé aux arrestations à l’intérieur du siège et d’avoir saisi le matériel (instruments de sonorisation, affiches, t-shirt et autres drapeaux) préparé pour l’accueil du Président du Rassemblement.

Autre fait à noter: les autorités provinciales et l’opposition ne se sont toujours pas accordées sur les dispositions concernant le séjour de Félix-Antoine-Tshisekedi à Lubumbashi. «Il arrivera à l’aéroport, ensuite la police le prendra en charge pour assurer la sécurité», a expliqué le gouverneur de province, tout en ajoutant que les partisans de l’opposition devront se soumettre aux dispositions imposées par les autorités provinciales. Mais la coordination du Rassemblement de l’opposition pour le Grand Katanga insiste sur l’accueil, le tour dans la ville en cortège et le meeting prévu au square Forest.[4]

 

Le 23 octobre, vers 11H00, plusieurs dizaines de militants d’opposition qui convergeaient vers l’aéroport de Lubumbashi ont été dispersés à coups de gaz lacrymogènes et de matraques. Deux d’entre eux ont été arrêtés par des policiers anti-émeutes déployés dans la ville tôt le matin. «La mairie de Lubumbashi a donné l’ordre de disperser tout attroupement de plus de cinq personnes», a déclaré le général Paulin Kyungu, chef de la police de la province du Haut-Katanga.
Félix Tshisekedi est arrivé à l’aéroport de Loano, à Lubumbashi, à 13h30’. Il a été escorté par deux jeeps de la police jusqu’à la résidence de Kyungu Wa Kumwanza.

N’ayant pas pu tenir le meeting prévu, Félix Tshisekedi a tenu une conférence de presse organisée à la résidence de Gabriel Kyungu. Il a annoncé que le Rassemblement ne considère plus Joseph Kabila comme Président de la République: «Nous leur avons donné une voie de sortie avec l’accord du 31 décembre, mais ils ont craché dessus. Nous sommes devenus intransigeants. Dès cet instant, nous ne considérons plus Joseph Kabila comme président. Nous préparons notre peuple à le mettre hors d’état de nuire». Il a dit d’avoir perdu la confiance dans la CENI et il a affirmé que l’Accord de la Saint Sylvestre perdra toute sa substance le 31 décembre 2017: «L’accord s’arrête le 31 décembre 2017. Nous sommes déterminés à voir la fin du règne Kabila au plus tard le 31 décembre 2017. Après ça, s’il continue de se maintenir par défi à la tête du Congo, nous agirons autrement. Donc pour nous, c’est terminé pour lui. La tripartie Ceni – Cnsa – Gouvernement est une comédie et ne nous engage en rien. Le monde a vu à qui on à faire avec Nangaa. Dans les 504 jours, ils vont encore créer d’autres choses dans le but de perturber le processus électoral».

A plusieurs reprises, il a accusé la Commission électorale nationale indépendante (CENI) de rouler pour la Majorité présidentielle afin de « prolonger illégalement le mandat du chef de l’Etat »: «Nous savions que Corneille Nangaa était au service de Joseph Kabila. Donc nous disons qu’on ne peut pas aller de manœuvres en manœuvres. Les 504 jours c’est simplement une invention pour permettre à Joseph Kabila de rester 504 jours de plus. Depuis le 30 septembre dernier, le corps électoral n’ayant pas été convoqué, ça veut dire qu’il n’y aura pas d’élection cette année. C’est ce qui nous fait dire que l’accord est déjà violé».[5]

 

Le 23 octobre, le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en RDCongo et chef de la MONUSCO, Maman Sidikou, a déclaré: «Je demande instamment aux autorités congolaises la libération immédiate et inconditionnelle des personnes arrêtées arbitrairement hier, le 22 octobre, à Lubumbashi. Je rappelle également aux autorités congolaises leurs obligations de garantir les libertés publiques et les droits civils et politiques à tous, conformément à la Constitution et aux engagements internationaux de la RDC».

La MONUSCO rapporte que les membres du Rassemblement participaient à une réunion privée au siège de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Selon un communiqué de la mission onusienne, «trois véhicules de la Police nationale congolaise (PNC) sont arrivés sur les lieux pour les encercler avant de faire appel à une unité commando des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) pour forcer l’entrée du lieu de réunion dans lequel les militants s’étaient barricadés. Les forces de défense et de sécurité ont alors arrêté de nombreux militants».[6]

 

Le 24 octobre, Felix Tshisekedi a accusé la police et les autorités de la ville de Lubumbashi d’avoir empêché, pour la deuxième fois, la tenue de son meeting. Pour lui, il s’agit d’une décision arbitraire, qui ne peut pas se comprendre dans un pays qui siège au Conseil des droits de l’homme des Nations unies. «On a barré la voie de sortie de l’hôtel, pour m’empêcher d’aller au meeting qui était prévu», a déclaré Felix Tshisekedi. «Nous avons décidé d’y aller à pied. Et 500 mètres plus loin, ils ont déployé une ceinture des policiers surarmés», a-t-il poursuivi.[7]

 

Le 24 octobre, dans une déclaration rendue publique par le président de son Conseil des sages, Pierre Lumbi Okongo, le Rassemblement de l’Opposition / aile Limete condamne fermement:

«• la répression par les forces de l’ordre et de sécurité des militants venus massivement accueillir son Président Félix Antoine Tshisekedi le lundi 23 octobre 2017 à l’aéroport de la Luano à Lubumbashi;

  • l’interdiction faite à son Président Félix-Antoine Tshisekedi de communiquer avec la population de Lubumbashi et les voies de fait qui ont été exercées le mardi 24 octobre 2017 sur sa personne par les forces de l’ordre et de sécurité, toujours à Lubumbashi;
  • les arrestations des militants des mouvements citoyens qui s’opèrent actuellement dans le pays, notamment celle de Marie Joëlle Essimbo du mouvement ECCHA» e exige

«• la libération sans condition de tous les membres du Rassemblement et des mouvements citoyens arrêtés».[8]

 

Le 24 octobre, 32 personnes arrêtées en marge de la visite du président du Rassemblement de l’Opposition à Lubumbashi ont été libérées. Toutefois, L’UDPS exige la libération des autres combattants qui seraient encore détenus dans les cachots des services de sécurité.[9]

 

Le 25 octobre, la délégation de l’Union Européenne (UE) en accord avec les chefs de mission des Etats-Unis, de la Suisse et du Canada ont publié le communiqué suivant:

«– Nous sommes profondément préoccupés par les restrictions à la liberté de réunion imposées par le gouvernement de la RDC et les autorités locales. Nous regrettons particulièrement l’arrestation, le 22 octobre, de nombreux membres de l’Opposition à Lubumbashi et appuyons l’appel de la MONUSCO à leur libération.

– L’interdiction de réunions publiques, la perturbation d’activités politiques pacifiques et les arrestations arbitraires sont incompatibles avec les normes démocratiques, en particulier avec la liberté de réunion et d’expression, que garantit la Constitution congolaise.

– Pour que des élections pacifiques et crédibles puissent se tenir en conformité avec l’Accord de la Saint-Sylvestre, tous les dirigeants politiques et membres de la Société civile doivent être libres de tenir des réunions publiques. Il est de la responsabilité des autorités de créer les conditions permettant de tenir ces réunions dans la paix et la sécurité. Les citoyens congolais doivent se sentir libres d’y participer sans crainte de violences, d’arrestations arbitraires ou de représailles.

– Nous appelons donc le gouvernement et les forces de sécurité à veiller à ce que les activités pacifiques de la Société civile ou de l’opposition puissent se dérouler sans perturbation. Les chefs des partis d’opposition ont également la responsabilité de s’assurer que leurs activités et leurs partisans respectent les normes démocratiques et l’état de droit».[10]

 

Le 25 octobre, dans une déclaration, la direction politique de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) a condamné la restriction des mouvements imposée par les forces de l’ordre et de sécurité à Félix Tshisekedi, président du Rassemblement, pendant son dernier séjour dans la ville de Lubumbashi (Haut-Katanga). Elle a aussi dénoncé l’utilisation «abusive» des forces de sécurité par le pouvoir.[11]

 

Le 25 octobre, dans un communiqué rendu public tard dans la nuit, le Rassemblement de l’Opposition (RASSOP) a invité ses militants à l’accueil de Félix Tshisekedi qui, ce jeudi 26 octobre arrivera à Kinshasa après sa mission effectuée à Lubumbashi. Selon Martin Fayulu, Coordonnateur des Actions du Rassemblement et qui a signé ce communiqué, le Président du Rassemblement Felix Tshisekedi tiendra un point de presse ce même jeudi en sa résidence.[12]

 

Le 26 octobre, le président du Rassemblement, Félix Tshisekedi, est arrivé à Kinshasa dans l’après-midi, en provenance de la ville de Lubumbashi. Des dizaines de sympathisants du Rassemblement ont fait le déplacement à l’aéroport international de N’djili pour l’accueillir et accompagner le cortège jusqu’au siège de l’UDPS, situé dans la commune de Limete, où est prévue une conférence de presse. Aucun incident n’a été signalé. La police n’a pas tenté d’empêcher l’engouement de la population autour du cortège. Félix Tshisekedi a annulé son point de presse prévu en fin de journée, préférant avoir au préalable des échanges avec des membres du Rassemblement après son retour à Kinshasa en provenance de Lubumbashi. Ce retour intervient au moment où l’Ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley, est en visite dans le pays.[13]

 

c. Une « Ville morte » dégénérée à Goma

 

Le  30 octobre, à Goma (Nord Kivu), plusieurs organisations de la société civile, dont le mouvement citoyen La Lutte pour le changement, la Lucha, avaient appelé la population de Goma à observer une journée « ville-morte » depuis le matin, pour obliger le président Joseph Kabila à quitter pacifiquement le pouvoir et pour réclamer la tenue des élections. Mais les choses ont dégénéré et un bilan provisoire fait état d’au moins cinq tués, dont un policier, 18 blessés et 28 personnes arrêtées. Il est difficile de dire ce qui s’est passé exactement, car les versions divergent.

Selon les organisateurs de la journée ville-morte, commerces, écoles et marchés étaient fermés ce matin et, dans certains quartiers, des jeunes avaient érigé des barricades et brûlé des pneus sur la chaussée, avant de se mettre à manifester dans les rues. La police serait alors intervenue en tirant des gaz lacrymogènes et des balles réelles pour tenter de disperser les manifestants. Ceux-ci ont réagi en incendiant le bureau de police du quartier populaire de Majengo, dans le nord de la ville.

L’un des organisateurs de la journée ville-morte, Ghislain Muhiwa, de la Lucha, assure que c’est à ce moment-là que quatre civils ont été tués par des balles de la police. Fous de rage, les jeunes se seraient alors jetés sur les policiers à coup de pierre. Bilan: un policier tué et deux autres grièvement blessés. Le maire de Goma donne une tout autre version des faits. Dieudonné Malere Mamicho dénonce un mouvement qu’il qualifie d’insurrectionnel. Des jeunes armés de machettes, de couteaux et de pierres auraient attaqué les forces de l’ordre vers 8 h, heure locale. Il y a eu des morts et des blessés.[14]

 

La manifestation avait été organisée par le collectif d’actions de la société civile (Casc), qui comprend le mouvement Lutte pour le changement (Lucha). «La résistance contre le régime sanguinaire et prédateur de Kabila a bel et bien commencé», a écrit ce mouvement de jeunes indignés sur son compte twitter. «Nous ne sommes pas dans la logique des élections en 2018. Cela doit être clair pour tout le monde! Élections 2017 ou transition sans Kabila!», a écrit Fred Bauma, un des dirigeants de Lucha, sur son compte twitter.

Dans la capitale Kinshasa, mégalopole de quelque 10 millions d’habitants, l’appel à manifester n’a ni été relayé, ni suivi. A Kisangani, grande ville du nord-est, la police a pourchassé les quelques manifestants qui tentaient de brûler des pneus sur les grandes artères. Les écoles étaient fermées alors que les autres activités tournaient au ralenti à Mbandaka (nord-ouest). A Lubumbashi, deuxième ville du pays (sud-est), la police a dispersé à coup de gaz lacrymogène et de matraque une quarantaine de jeunes qui tentaient de manifester.

La tension politique est vive en RDC en raison du maintien au pouvoir du président Joseph Kabila.

En dépit d’un mandat qui a expiré fin 2016, M. Kabila est toujours au pouvoir et aucun calendrier électoral n’a encore été rendu public. Les manifestations de l’opposition ou autres mouvements citoyens sont interdites ou réprimées dans tout le pays.[15]

 

2. L’UNC DE VITAL KAMERHE A ANNONCE SON RETRAIT DU GOUVERNEMENT TSHIBALA

 

Le 23 octobre, dans un communiqué publié dans l’après midi, le président de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), Vital Kamerhe, a annoncé que son parti se retire du gouvernement Tshibala.

Dans ce communiqué, l’UNC a annoncé explicitement le retrait de son délégué, Pierre Kangudia Mbayi, de son poste de ministre d’État au budget, au sein du gouvernement:

«Considérant le retard et la certitude de la non organisation des élections au 31 décembre 2017; Considérant que la participation de l’UNC au gouvernement était de contribuer à l’organisation des élections dans le délai;

compte tenu du fait qu’à ce jour, la CENI n’a toujours pas publié le calendrier électoral conforme à l’Accord de la Saint-Sylvestre (…)

après concertation avec le camarade Pierre Kangudia Mbayi,

la direction politique de l’UNC décide le retrait du délégué de l’UNC du gouvernement, en la personne de Pierre Kangudia Mbayi, ministre d’État au budget».

Un cadre de l’UNC a affirmé que «la présence de l’UNC au gouvernement avait une seule motivation: l’organisation des élections en décembre 2017 conformément à l’accord du 31 décembre, mais avec l’annonce de 504 jours par le président de la Ceni, on s’éloigne de cet objectif».

Un peu plus tard dans le même après midi, dans une correspondance, le président de l’UNC, Vital Kamerhe, a officiellement notifié le Premier ministre Bruno Tshibala de la décision du retrait de son délégué au gouvernement de la république: «J’ai l’honneur de vous informer que, conformément à la décision de la direction politique nationale de l’UNC de ce jour (…) l’UNC vient de retirer du gouvernement son délégué, monsieur Pierre Kangudia Mbayi, Ministre d’Etat pour le budget».[16]

 

Le 24 octobre, lors d’un point de presse à Kinshasa, Pierre Kangudia a déclaré s’être désolidarisé de la décision de l’UNC. Il a affirmé que cette décision ne le concerne pas et qu’il ne va pas démissionner.

«Comment peut-on justifier mon seul retrait des Institutions, tout en laissant le représentant (Gustave Omba) de mon parti continuer d’exercer ses fonctions à la CENI, organe attitré pour organiser les élections?», s’est interrogé Pierre Kangudia au cours de sa conférence de presse. «Je refuse de satisfaire les intérêts égoïstes et personnels de certaines personnes de créer inutilement une crise au sein du gouvernement qui va fragiliser les membres du gouvernement issus de l’opposition (…) Je vais solennellement me remettre à la disposition du président, car c’est à lui seul que revient la décision de me relever de mes fonctions», a-t-il ajouté.

Pierre Kangudia a expliqué le contenu de l’échange qu’il a eu avec Vital Kamerhe le jour précédent, le 23 octobre 2017, avant l’annonce par l’UNC de son retrait du gouvernement: «J’étais reçu en audience par Vital Kamerhe. Il m’a annoncé à 12H30 que les informations en sa possession faisaient état de mon remaniement dans les six heures qui suivaient et qu’il voulait me mettre à l’abri de l’humiliation. Il a dit m’avoir accordé ce délai pour déposer ma démission. Mais à peine rentré au bureau, je constatais que la décision était déjà dans la presse. Le service courrier de la primature avait réceptionné le courrier adressé au Premier ministre avec copie au président de la république à 16 heures».

Pierre Kangudia a dénoncé une décision unilatérale, affirmant qu’il n’avait jamais été consulté au préalable: «Je n’ai pas été consulté. Tout le monde était déjà informé qu’on m’avait déjà retiré du gouvernement, mais moi, je n’étais pas au courant. Quand on m’a donné l’information, j’ai demandé à ce qu’on me laisse deux jours pour réfléchir, on m’a dit non. J’ai demandé ensuite un jour, on m’a encore dit non. On m’a dit de réfléchir jusqu’à 18 heures. Le temps d’arriver dans mon bureau, j’apprends que la décision est déjà rendue publique et je la reçois via WhatsApp. Jai même refusé d’y croire (…) Je crois que je suis plutôt victime d’une cabale».

Certains membres de l’UNC avaient d’ailleurs révélé qu’il était sur le point de créer un autre parti.[17]

 

Le secrétaire interfédéral de l’UNC, Baudouin Mayo Mambeke, a affirmé que «Pierre Kangudia est un citoyen congolais qui jouit des libertés garanties par la Constitution. Il a estimé qu’il ne quitte pas le gouvernement et que c’est plutôt l’UNC qu’il quitte. Nous en prenons acte, c’est tout».

Le porte parole de l’UNC, Jolino Makelele, dans une interview a déclaré que, «lorsque vous n’avez plus la confiance du parti qui vous a mandaté, ne cherchez pas à savoir pourquoi. Le seul fait qu’on vous dise que devez rendre le tablier, vous devez le faire. C’est comme ça en politique. Ce sont des décisions qui sont hors de portée de la justice. Il ne faut pas chercher à les motiver. Je ne peux que déplorer l’attitude de notre collègue. C’est le parti qui l’a mandaté. Lorsque le parti vous demande de partir, j’ai du mal à comprendre comment on peut invoquer le fait que c’est le président de la République qui vous a nommé et qu’on s’en remet à lui. En politique, je ne pense pas que ce soit d’une grande élégance».[18]

 

Le 25 octobre, dans un communiqué, la direction politique de l’UNC a donné 48 heures de temps à ses cadres encore actifs au ministère du budget, afin de se retirer du cabinet de Pierre Kangudia et regagner le parti. À défaut, le parti sera obligé d’en constater l’auto-exclusion. La direction politique de l’UNC a déclaré, en outre, de prendre acte de “l’auto exclusion” du parti de Pierre Kangudia et de la démission de Mamie Kanku, présidente de la Ligue des femmes de l’UNC et de Tracien Boma, président de la ligue des jeunes de l’UNC. Enfin, elle remercie et encourage les cadres du parti, membres du cabinet du budget qui se sont spontanément désolidarisés de Pierre Kangudia.[19]

[1] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 21.10.’17; Radio Okapi, 21.10.’17

[2] Cf José Mukendi – Actualité.cd, 21.10.’17

[3] Cf RFI, 22.10.’17

[4] Cf RFI, 23.10.’17

[5] Cf AFP – Radio Okapi, 23 et 24.10.’17; Actualité.cd, 23.10.’17

[6] Cf Actualité.cd, 23.10.’17

[7] Cf Radio Okapi, 25.10.’17

[8] Cf Forum des As – Kinshasa, 26.10.’17  http://www.forumdesas.org/spip.php?article13576

[9] Cf Radio Okapi, 25.10.’17

[10] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 26.10.’17

http://www.lepotentielonline.com/index.php?option=com_content&view=article&id=18031:preoccupations-au-sujet-des-incidents-a-lubumbashi&catid=90:online-depeches

[11] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 25.10.’17

[12] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 26.10.’17

[13] Cf Actualité.cd, 26.10.’17; Politico.cd, 26.10.’17

[14] Cf RFI, 30.10.’17

[15] Cf AFP – Africatime, 30.10.’17

[16] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 23.10.’17 https://7sur7.cd/new/2017/10/flash-kamerhe-demande-a-pierre-kangudia-de-demissionner-du-gouvernement/

[17] Cf Actualité.cd, 24.10.’17

[18] Cf RFI, 25.10.’17; Radio Okapi, 25.10.’17

[19] Cf Stanys Bujakera Tshiamala – Actualité.cd, 25.10.’17