Pour le respect de la Constitution et des lois qui en decoulent

Editorial Congo Actualité n. 247 – Par le Réseau Paix pour le Congo

Le respect de la Constitution et des textes juridiques est le fondement indispensable de toute forme de démocratie. Il ne semble pas être le cas de la République démocratique du Congo. Deux exemples le démontrent.

Violation du Règlement Intérieur du Sénat

Le 31 juillet, le Sénat a terminé la session parlementaire extraordinaire de juillet, sans que les sénateurs soient parvenus à adopter le projet de loi sur la répartition des sièges par circonscription électorale pour les élections locales, faute de quorum qualifié pour ce vote (55 votes favorables sur 108 sénateurs), étant donné que sur 62 Sénateurs qui ont pris part à ce vote, seulement 48 ont voté oui, un a voté non et treize se sont abstenus.

Le 11 août, s’est ouverte une deuxième session extraordinaire du Sénat. Elle était consacrée exclusivement à l’examen et à l’adoption du même projet de loi. À la fin d’une plénière qui n’a duré qu’une dizaine de minutes et qui a été boycottée par l’opposition, le Sénat l’a finalement approuvé. Sur les 108 membres qui composent le Sénat, 77 ont pris part au vote et ils ont voté Oui. Personne n’a voté non et aucun ne s’est abstenu.

L’annonce de la convocation d’une deuxième session extraordinaire au Sénat a fait l’effet d’une bombe dans les salons politiques de Kinshasa. Peut-on convoquer deux sessions extraordinaires du Parlement à l’intersession parlementaire? Sur ce point précis, les avis sont partagés selon qu’on se réclame de la Majorité ou de l’Opposition.

Selon la majorité, la Constitution ne détermine pas le nombre des sessions extraordinaires du Parlement. Le législateur fixe juste la durée d’une session extraordinaire, laquelle ne peut excéder 30 jours. Par conséquent, le parlement ou une de ses chambres peut être convoquée en autant de sessions extraordinaires, à condition de ne pas dépasser le délai de 30 jours francs.

Par contre, selon l’opposition, le Parlement ne peut pas tenir deux sessions extraordinaires consécutives. Pour le soutenir, elle s’appuie sur les dispositions de l’article 75 du Règlement Intérieur du Sénat : « Si l’ordre du jour de la session extraordinaire n’est pas épuisé dans les trente jours, celle-ci (la session extraordinaire) est clôturée d’office. Dans ce cas, les matières de 1’ordre du jour restées en suspens sont examinées en priorité au cours de la session ordinaire comme arriérés législatifs« .

Il semble donc que la deuxième session extraordinaire du Sénat ait été convoquée en violation des dispositions de l’article 75 de son règlement intérieur.

Une énième violation de la Constitution déjà en préparation?

Après le renvoi sine die par la Commission électorale de l’élection des gouverneurs des nouvelles provinces, nombreux sont ceux qui, à juste titre, sont convaincus que ces scrutins n’auront plus jamais lieu. Plusieurs scénarii sont à l’œuvre pour éviter le vide juridique que connaissent déjà ces provinces instituées juridiquement mais sans exécutifs pour les gouverner. Deux thèses sont diamétralement opposées.

Selon la première, soutenue par une grande partie de la Majorité Présidentielle (MP), le chef de l’Etat doit prendre ses responsabilités en procédant à la désignation pure et simple par Ordonnances présidentielles des nouveaux gouverneurs de provinces. Les défenseurs de cette thèse s’appuient sur l’article 198 de la Constitution, selon lequel « … Lorsqu’une crise politique grave et persistante menace d’interrompre le fonctionnement régulier des institutions provinciales, le Président de la République peut, par une ordonnance délibérée en Conseil des ministres et après concertation avec les Bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, relever de ses fonctions le Gouverneur d’une province« . Selon la MP, si le Chef de l’Etat peut, dans certaines situations, destituer des gouverneurs de leur fonction, il peut aussi les nommer. Mais l’article 198 de poursuivre: « Dans ce cas, la Commission électorale nationale indépendante organise l’élection du nouveau Gouverneur dans un délai de trente jours« .

Selon la deuxième thèse, soutenue par l’Opposition et certains partis politiques de la MP, il faut respecter les termes de la Constitution qui, claire comme l’eau de roche, ne prévoit aucune disposition qui autorise le Président de la République à désigner les gouverneurs de provinces, compétence qui continue à être dévolue aux Assemblées provinciales. En effet, l’article 80 de la Constitution stipule que « Le Président de la République investit par ordonnance, dans un délai de quinze jours, les Gouverneurs et les Vice-Gouverneurs de province élus conformément à l’article 198« , selon lequel « Le Gouverneur et le Vice-Gouverneur sont élus pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois par les députés provinciaux au sein ou en dehors de l’Assemblée provinciale. Ils sont investis par ordonnance du Président de la République« .

Conséquences

Ces violations répétées des textes juridiques entraînent nécessairement une certaine désorientation, du ressentiment, de conflit, la division, l’instabilité politique et des mouvements de protestation qui empêchent le déroulement normal de la politique, la gouvernabilité du pays, le développement économique de la société et le bien-être de la population elle-même.

Pour le bien du Pays, il est donc nécessaire et urgent de revenir à cette valeur fondamentale de la démocratie: le respect de la loi fondamentale (la Constitution) et des lois qui en découlent. Si cela est un devoir pour tous, il l’est surtout pour tous ceux qui ont été élus pour diriger les institutions de l’Etat.