Congo Actualité n. 437

PARLEMENT: L’URGENTE NÉCÉSSITÉ DE DONNER UNE PRIORITÉ ABSOLUE AUX RÉFORMES ÉLECTORALES

SOMMAIRE

1. ENCORE DANS L’ATTENTE DU NOUVEAU GOUVERNEMENT
2. À l’ASSEMBLÉE NATIONALE
a. L’ouverture de la session parlementaire ordinaire de mars
b. Quelques réactions au discours d’ouverture
c. L’adoption du calendrier de la session ordinaire de mars
3. AU SÉNAT
a. L’adoption du calendrier de la session ordinaire de mars

1. ENCORE DANS L’ATTENTE DU NOUVEAU GOUVERNEMENT

Le 22 février, une semaine après sa nomination, le Premier Ministre Sama Lukonde Kyenge a commencé les consultations des différentes forces politiques et sociales, en vue de la formation de son prochain gouvernement.
Après son échange avec le Chef de l’État Félix Tshisekedi, Sama Lukonde avait souligné que ce gouvernement, le premier de l’union sacrée en gestation, va tenir compte de la géopolitique, de la représentation nationale, des critères de bonne moralité, de compétence et d’expérience, de la participation des femmes et de la jeunesse. Les prétendants membres du gouvernement devront aussi s’engager à signer un code d’éthique, de manière à ce que, lorsqu’on est mis en cause ou poursuivi par la justice, on puisse se déporter automatiquement et ne pas attendre la saisine au niveau du parlement, S’agissant de la taille du gouvernement, Sama Lukonde a rassuré qu’elle sera réduite (environs 44 membres), conformément à la vision du président de la République. Chacun des 24 regroupements politiques qui composent la nouvelle majorité parlementaire, qui compte 391 députés sur les 500 de la chambre basse du Parlement, devra présenter trois candidats pour chaque portefeuille ministériel.
Là où 67 postes étaient partagés entre FCC-CACH, les responsabilités au sein du prochain exécutif devraient être partagées désormais entre plusieurs regroupements, dont Ensemble de Moïse Katumbi, le MLC de Jean Pierre Bemba, l’UDPS de Félix Tshisekedi, l’UNC de Vital Kamerhe, l’AFDC-A de Bahati Lukwebo, les dissidents du FCC et d’autres alliés au sein de l’Union Sacrée. La tâche s’annonce donc difficile.[1]

Le 1er mars, le Premier Ministre Sama Lukonde Kyenge a terminé les consultations des forces politiques et sociales, en vue de la formation prochaine du gouvernement de l’Union Sacrée de la Nation. Pendant 7 jours, il a consulté plus de 40 délégations de divers secteurs de la vie nationale: acteurs politiques, opérateurs économiques, organisations socio-professionnelles et membres de la société civile. Ces consultations politiques lui ont permis d’avoir un aperçu général des différentes forces en présence, en vue de la formation de son gouvernement. Ces échanges lui ont également permis de récolter des suggestions et propositions, en vue d’enrichir son programme de gouvernement qu’il défendra devant la représentation nationale, lors de la session parlementaire de mars.[2]

Le 14 mars, le secrétaire général de l’Union pour la Démocratie t le Progrès Social (UDPS), Augustin Kabuya, a révélé que ce parti aura 8 postes ministériels au prochain gouvernement.
Le numéro deux de l’UDPS a fait savoir que des commissions de gestion des ambitions ont été mises en place au sein du parti, pour enregistrer les candidats qui veulent faire partie du gouvernement de l’Union sacrée de la Nation. Il a affirmé que 72 personnes se sont déjà inscrites comme candidats  et que les 10 ministres de l’actuel gouvernement (du premier ministre sortant Sylvestre Ilunga) veulent aussi être reconduits au prochain gouvernement. Si aux 72 candidats on ajoute les 10 ministres actuels, on est devant une situation de 82 personnes qui veulent occuper les 8 postes disponibles. La même situation on la constate aussi au sein des autres partis et regroupements politiques. C’est ce qui bloque la mise en place du nouveau gouvernement.[3]

Le 14 mars, en ce qui concerne le quota des postes ministériels à réserver à chaque parti ou regroupement politique, dans une interview le député Alphonse Ngoy Kasanji, membre du PPRD-Mosaïque, une fraction du parti de Joseph Kabila qui a adhéré à l’Union Sacrée de la Nation prônée par le Président Tshisekedi. a demandé le respect du principe du poids politique de chaque parti ou regroupement politique: «Par rapport à la stratégie électorale de notre parti, pour avoir plus de députés, il y avait plusieurs partis fictifs qui n’avaient jamais fonctionné et dont leurs présidents étaient désignés par la hiérarchie, mais notre identité reste toujours PPRD (Mosaïque-PPRD) et nous comptons 51 députés. Dans cette logique-là, il ne faut pas qu’on nous réduise, mais qu’on nous considère comme Mosaïque et que notre poids politique ne soit déconsidéré».
Au sein du regroupement AFDC-A de Bahati Lukwebo, Steve Mbikayi du Parti Travailliste (PT) s’est indigné du fait que la liste des ministrables envoyée au Premier Ministre a été dressée sans le concourt de son parti: «Sur les 41 députés, 10 appartiennent aux alliés, dont le PT est majoritaire. Les alliés ne sont pas associés à la désignation des animateurs des institutions. Dictature éhontée?».
Ensemble pour la République de Moise Katumbi n’a pas apprécié la démarche utilisée jusque-là et a  souhaité que tout soit clair au départ, qu’à chaque portefeuille attribué soit déjà assigné un nom. Il a insisté pour que les noms qu’il a soumis soient ceux-là qui seront repris pour les postes réservé à son camp. Les dernières indiscrétions parlent de cinq portefeuilles qui seront gérés par les proches de l’ancien gouverneur.
Pour ce qui est du Mouvement de Libération du Congo (MLC), le Premier ministre proposait deux portefeuilles là où Jean-Pierre Bemba en voulait cinq. Un compromis aurait été trouvé avec trois ministres.[4]

Le 25 mars, dans un communiqué, le président de la cellule de crise du Front Commun pour le Congo (FCC), Raymond Tshibanda, a annoncé que cette plateforme politique ne participera pas au gouvernement de l’Union sacrée de la Nation. La famille politique de l’ex-président Josep Kabila justifie sa position par le « déni systématique de la constitution, des lois et règlements qui régissent la gouvernance politique », auquel elle dit avoir assisté ces derniers temps et qu’elle qualifie de « dérive dangereuse ». «Gardien des acquis démocratiques et d’une transition pacifique légués aux congolais de toutes tendances, le FCC ne participera pas au gouvernement du premier ministre Sama Lukonde à qui il souhaite, cependant, bonne chance dans l’intérêt du peuple congolais», lit-on dans ce communiqué. Le FCC ajoute que ceux d’entre ses membres qui, tentés par la course aux postes, se retrouveront dans ce gouvernement, le seront en contradiction avec ses valeurs.
Il faut rappeler que plusieurs cadres du FCC ont adhéré à l’Union sacrée de la Nation, initiative du président Félix Tshisekedi. Il s’agit notamment de Julien Paluku, Jean-Lucien Bussa, Alphonse Ngoy Kasanji, Lambert Mende Omalanga et Steve Mbikayi.[5]

Le 25 mars, dans un communiqué, le secrétaire permanent du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), Emmanuel Ramazani Shadary, a fait savoir que, sur instruction de son président national, Joseph Kabila, ce parti n’enverra aucun de ses membres au gouvernement de l’Union Sacrée. À cet effet, le PPRD prévient qu’il ne donne mandat à personne pour l’engager au sein du gouvernement en gestation. Par ailleurs, il appelle le peuple congolais à rester « vigilant pour la tenue des élections dans le délai légal ».[6]

Le 27 mars, au cours d’une conférence de presse, l’Association Congolaise pour l’Accès à la Justice (ACAJ) a dénoncé la prise en otage de la population par l’Union sacrée, orchestrée selon elle, par la classe politique, toutes tendances confondues, après la fin de la coalition FCC-CACH.
Me Georges Kapiamba, président  de cette ONG de défense des droits de l’homme a indiqué que, «après un leurre de changement de majorité à l’Assemblée nationale, suivi de la démission du Gouvernement du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba, la désignation d’un informateur et enfin la nomination d’un nouveau Premier ministre, Sama Lukonde Kyenge, l’Union sacrée de la Nation n’est qu’une mue de l’ancienne coalition FCC-CACH, car ses membres sont en réalité préoccupés par leurs propres positionnements et intérêts égoïstes au détriment de la population».
Georges Kapiamba a fait savoir que «le retard enregistré pour la formation du Gouvernement Sama Lukonde Kyenge est essentiellement dû à l’incurie, l’insouciance, l’irresponsabilité et la gourmandise de la plupart de politiciens ayant adhéré à l’Union Sacrée pour la Nation. Ils se battent bec et ongles, soit pour préserver leur présence au Gouvernement, soit pour migrer du Parlement vers le Gouvernement, soit enfin pour obtenir des portefeuilles ministériels substantiels qui leur permettraient d’en faire des distributeurs de billets ou des arrière-cours de leurs partis politiques et/ou familles». D’après Me Georges Kapiamba, en dépit de la bonne volonté exprimée par le chef de l’État, il y a un groupe d’individus qui bloquent la formation et la sortie du nouveau gouvernement, dont certains ministres qui ne veulent pas quitter le gouvernement et des députés et sénateurs qui veulent quitter le Parlement pour devenir des ministres, cédant leur siège à leurs épouses, ou à leurs enfants. ou à tout autre membre de leur famille.
ACAJ demande par ailleurs au président Tshisekedi de «constater l’incapacité et la mauvaise foi de la classe politique Congolaise de parvenir à la formation d’un Gouvernement resserré et moins budgétivore qui prendrait en charge le bien-être du peuple Congolais et de procéder, le cas échéant, à la dissolution de l’Assemblée Nationale, aux fins de permettre au peuple de se choisir des hommes et des femmes imbus d’un esprit d’Etat et patriotique … Dans l’hypothèse où la classe politique persisterait dans son irresponsabilité doublée d’arrogance, d’insouciance et d’égoïsme, l’ACAJ, en accord avec d’autres ONG et mouvements citoyens, se réserve le droit d’en appeler, conformément à la Constitution, à des manifestations publiques ayant pour objectif d’obtenir la dissolution de l’Assemblée Nationale».
Depuis la nomination de Sama Lukonde, le 15 Février 2021, la formation du gouvernement traîne encore. Selon plusieurs sources, les discussions se poursuivent encore entre les différentes parties prenantes notamment les dissidents du FCC, l’AFDC, l’UDPS, le MLC et Ensemble de Moïse Katumbi.[7]

Le 29 mars, le Président de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso, a affirmé que le retard pris dans la formation du gouvernement provoque une certaine impatience dans la classe politique congolaise. Il a expliqué aux députés réunis en plénière que le retard constaté dans la mise en place du gouvernement est causé notamment par le souci de répondre aux équilibres politiques ainsi qu’aux exigences constitutionnelles de représentativité nationale et du genre: «La mise en place d’un nouveau Gouvernement de la République est, certes, une nécessité, mais il faut éviter qu’il ne soit à l’origine des dissensions au sein de la nouvelle majorité. Il doit répondre aux équilibres politiques ainsi qu’aux exigences constitutionnelles de représentativité nationale et du genre. Ce qui nous évitera d’assister encore une fois, comme par le passé, aux réactions revendicatives des ressortissants de certaines provinces ou de certaines catégories sociales». Entretemps, les tractations se poursuivent pour harmoniser les listes des candidats des partis et regroupements politiques devant participer au gouvernement.[8]

2. À l’ASSEMBLÉE NATIONALE

a. L’ouverture de la session parlementaire ordinaire de mars

Le 15 mars, le Président de la chambre basse du parlement, Christophe Mboso Nkodia, a ouvert les activités de la session ordinaire de mars. Dans son discours d’ouverture, il s’est réjoui de la requalification de la majorité parlementaire qui a entraîné l’élection d’un nouveau Bureau à l’Assemblée nationale et la nomination d’un nouveau Premier ministre appelé à conduire un nouveau Gouvernement issu de la nouvelle majorité parlementaire. Christophe Mboso a rappelé que l’opposition a bel et bien sa place à l’Assemblée nationale. Il a promis de lui donner la possibilité d’apporter des critiques, en vue de contribuer à la gouvernance du pays: «L’Opposition a sa place dans notre Chambre. Les droits qui lui sont reconnus seront respectés. Permettre à l’opposition parlementaire de jouir de ses droits et de disposer de moyens substantiels, c’est lui donner la possibilité d’être plus constructive au bénéfice de l’ensemble des citoyens et cela l’incitera à renoncer aux pratiques d’obstruction … car toute opposition républicaine doit proposer des alternatives crédibles et constructives, destinées à éclairer la marche de la gouvernance».
Il sied de noter que la nouvelle majorité parlementaire s’appelle l’Union Sacrée de la Nation. Elle est née à la suite de la rupture de la coalition FCC-CACH qui liait Félix Tshisekedi à Joseph Kabila.
13 de 16 groupes parlementaires de l’Assemblée nationale appartiennent à l’Union sacrée de la nation et 3 sont dans le FCC, mais il y a des réglages à faire, notamment sur le nombre, les chiffres ou carrément sur les noms des uns et des autres.[9]

Le Président de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso Nkodia, a indiqué que la priorité sera accordée aux réformes électorales. Il a souligné que les lois qui ont trait à l’organisation des élections, en l’occurrence la loi électorale et la loi organique portant organisation et fonctionnement de la CENI seront prioritairement examinées au cours de la session parlementaire de mars. Selon lui, «cette attention particulière portée sur ces lois implique notamment la désignation des animateurs de la CENI … Si la fois passée le consensus n’a pas pu se dégager autour d’un candidat, nous osons espérer que, cette fois-ci, les Chefs des confessions religieuses, dépasseront désormais leur égo et parviendront à désigner, dans le meilleur délai, leur délégué à la CENI parmi les meilleurs et dignes fils et filles du pays». Il a martelé sur le fait que, «plus le remplacement des membres de la CENI traine, plus nous accumulons du retard. Chacun doit en être conscient et assumer pleinement sa part de responsabilité».
Le Président de la chambre basse du parlement invite d’autres composantes de la société civile à désigner déjà leurs représentants à la CENI: «Nous invitons les autres composantes de la société civile ainsi que la classe politique à procéder le plus rapidement à la désignation d’autres membres de la CENI. L’Assemblée nationale est totalement mobilisée pour accélérer l’entérinement de tous les membres, une fois désignés, afin que, jouant notre part de partition, nous parvenions à lever irrémédiablement cet obstacle majeur à la poursuite du processus électoral».[10]

En dehors des questions électorales qui demeurent prioritaires pour la présente session de mars, l’Assemblée nationale va également se pencher sur d’autres matières de la vie nationale. C’est ce qu’a dit Christophe Mboso Nkodia, Président de la chambre basse du parlement, dans son discours d’ouverture: «Si les questions électorales demeurent prioritaires pour la présente session, leur examen ne nous dispense pas, pour autant, de focaliser notre attention sur d’autres domaines de la vie nationale. Nos délibérations porteront, en effet, sur bien d’autres sujets en rapport avec les matières législatives et non législatives».
– En ce qui concerne les matières législatives, il y a lieu de mentionner:
Le projet de loi autorisant la ratification du Protocole relatif à la création du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.
Le projet de loi autorisant la ratification du Protocole de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des personnes handicapées en Afrique.
La proposition de loi portant protection et promotion des droits des personnes vivant avec handicap. La proposition de loi déterminant les principes fondamentaux relatifs à l’exercice du droit de grève.
Le projet de loi autorisant la ratification de l’Aménagement de Kigali au Protocole de Montréal sur les substances qui appauvrissent la couche d’ozone.
La proposition de loi modifiant et complétant la loi portant principes fondamentaux relatifs à l’agriculture.
La proposition de loi modifiant et complétant le Code pénal (peines applicables aux infractions prévues par les Actes uniformes de l’OHADA).
Le projet de loi portant modalités d’application de l’état d’urgence et de l’état de siège en République Démocratique du Congo.
– En ce qui concerne les matières non législatives, il faut citer:
L’audition et l’approbation du programme du nouveau gouvernement.
L’examen des rapports de la Commission Electorale Nationale Indépendante sur le processus électoral.
La réorganisation des Groupes parlementaires, des Commission permanentes et Sous-commissions.
L’examen du rapport annuel d’activités de la Commission Nationale des Droits de l’Homme.
L’entérinement de la désignation des membres de la Commission Electorale Nationale Indépendante.
La prestation de serment des Juges membres de la Cour des comptes.
La révision de certaines dispositions du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale.[11]

b. Quelques réactions au discours d’ouverture

Le 15 mars, à  l’issue de la séance plénière d’ouverture de la session ordinaire de mars, le député national Gaël Bussa, secrétaire nationale chargé de la Jeunesse du parti politique Courant des démocrates rénovateurs (CDR) a déclaré que cette session représente beaucoup pour la population congolaise qui veut voir ses conditions de vie s’améliorer: «C’est une session de beaucoup d’enjeux. Nous savons tous qu’un premier ministre a été nommé depuis le 15 février, un mois aujourd’hui. La population, au delà de la publication et de l’investiture du gouvernement, attend l’amélioration de la situation sociale, càd la baisse de prix de denrées alimentaires, la réhabilitation et la construction des routes, l’accès à l’eau, à l’électricité, à la gratuité de l’enseignement primaire et aux soins de santé».
Outre les attentes de la population, il a détaillé  les réformes que son parti membre de la Coalition des démocrates (CODE) et de l’Union Sacrée de la Nation (USN) compte soutenir: plusieurs réformes au niveau de la sécurité, de la justice, de l’éducation et du processus électoral. Gaël Bussa a rappelé que la CDR a fait des propositions depuis le 20 janvier 2020 soutenant les réformes électorales, notamment l’élection présidentielle au suffrage universel direct et à la majorité absolue des suffrages exprimés; l’élection des gouverneurs et leur vices au suffrage universel direct; l’application du seuil d’éligibilité au niveau de la circonscription et non au niveau national; la suppression du paiement de la caution par les candidatures à tous les niveaux, en vue de consacrer l’égalité des droits et donner la chance à tous les congolais de participer à la vie publique, sans entrave financière.[12]

Le 15 mars, le député national Delly Sessanga, président d’Envol, a salué le discours du Président de l’Assemblée nationale Christophe Mboso qui a annoncé que des réformes seront engagées au cours de la session de Mars. Il a cependant dit noter un flou dans ledit discours en ce qui concerne la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Selon lui, la réforme de cette institution doit précéder la désignation de ses membres: «Le Président de l’Assemblée a souligné l’intérêt des réformes, ce qui est une très bonne chose. En revanche, il faudrait qu’on se mette d’accord sur la discussion du calendrier sur l’agencement de la mise en œuvre de ces réformes. Il y a en particulier la question de la mise en place de la CENI et il y a un consensus aujourd’hui dans la société civile, dans la classe politique que l’on puisse aussi procéder à la mise en place des animateurs de la CENI après avoir réformé, après avoir pensé la loi sur la CENI. Cet élément n’a pas été clarifié dans le discours du président de l’Assemblée nationale».
Et d’ajouter: «De la même manière les outils pour pouvoir conduire ces réformes électorales, je parle ici de la loi électorale déposée avec le G13, de la pétition en vue de la révision de la constitution déposée par l’Envol, de la loi Lutundula sur la CENI, tous ces outils sont à l’Assemblée nationale. Je pense que si on veut procéder en ordre, il faut qu’on lance ce débat en donnant une priorité sur la loi Lutundula pour mettre en place la CENI et non pas commencer par la mise en place de la CENI avant de l’avoir réformée».
Ce membre du G13 invite le bureau Mboso à faire une différence avec le précédent bureau qui était dirigé par Jeanine Mabunda. «Je rappelle que si nous avons eu des soubresauts dans ce pays de juillet à août, de l’année dernière, c’est parce que le bureau sortant voulait procéder à la mise en place de la CENI avant de l’avoir réformée. J’espère que notre bureau ne commettra pas le même impair», a-t-il conclu.[13]

La Synergie des Missions d’Observation Citoyenne des Élections (SYMOCEL) a salué la volonté exprimée par Christophe Mboso, président de l’assemblée nationale, d’inscrire la problématique des réformes électorales parmi les questions à examiner au cours de cette session.
Toutefois, «un peu surprise, la SYMOCEL a vu en l’appel lancé aux différentes composantes concernées de présenter leur délégués, une sorte de quiproquo qui pourrait entretenir la confusion sur les aspirations réelles relatives à la problématique des réformes électorales, car celles-ci ne peuvent avoir leur sens véritable que si elles sont examinées et adoptées préalablement à toute désignation de nouveaux animateurs de la Commission électorale Nationale Indépendante (CENI)».
La SYMOCEL estime que la loi portant organisation et fonctionnement de la CENI devrait être examinée et adoptée en premier: «Cela pourra faciliter la désignation rapide des animateurs de la CENI dans des conditions et procédures clairement définies par la loi ainsi réformée, pour nous éviter de retomber dans les erreurs du passé». La SYMOCEL insiste sur le fait que ces réformes doivent précéder le choix des animateurs de la CENI.[14]

Le député national Gratien de Saint Nicolas Iracan a déclaré que la réforme de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) doit faire partie des matières prioritaires lors de cette session parlementaire de mars. Mais bien avant, rappelle-t-il, il est nécessaire d’examiner le rapport de la CENI: «Ce qui est prioritaire pour le moment, c’est la loi portant organisation et fonctionnement de la CENI, mais il faut commencer par analyser les rapports de la CENI. Il y a au moins deux rapports qu’il faut analyser et après cela, il faut soumettre ça au débat et après débat il faudra au moins retenir les observations qui vont faire en sorte qu’on puisse faire des réformes de la loi portant organisation et fonctionnement de la CENI et de la loi électorale».
En outre, le député Gratien de Saint Nicolas Iracan s’est dit favorable à l’idée du recensement pour identifier la population. Il a toutefois précisé que le recensement ne devrait pas être un motif de perturbation du calendrier électoral: «Moi, je suis tout à fait d’accord avec le recensement, parce que nous sommes dans un pays où on ne connaît avec précision le nombre de la population et la conséquence c’est que, quand on passe à l’enrôlement, il y a des étrangers qui sont enrôlés. C’est très dangereux, Encore, l’absence de données démographiques précises peut favoriser la tricherie, permettant d’aller directement à la base du fichier électoral et changer les chiffres. Donc c’est important qu’il y ait recensement. On saura au moins la taille de la population congolaise. Mais il faut que le recensement ne puisse pas perturber le calendrier électoral»,
Le débat sur le recensement général de la population est d’actualité au pays et divise davantage la classe politique congolaise. S’il arrivait de recenser la population avant les élections de 2023, plusieurs observateurs redoutent le glissement du mandat de l’actuel président, alors que des voix s’élèvent de plus en plus pour demander la tenue des élections conformément à la constitution.[15]

c. L’adoption du calendrier de la session ordinaire de mars

Le 22 mars, une semaine après l’ouverture de la session parlementaire, aucune plénière n’a été convoquée. En effet, pour que la plénière soit convoquée, il faut que se tienne auparavant la réunion de la conférence des présidents des groupes parlementaires et des commissions permanentes. C’est elle qui a pour prérogative de décider de l’ordre du jour qui est proposé à la plénière. Y siègent les présidents des groupes parlementaires et les présidents des commissions permanentes de l’Assemblée nationale. Problème. A ce stade, suite à la requalification de la majorité, on ne sait pas encore avec précision quelle est la nouvelle configuration des groupes parlementaires et des commissions permanentes, car certains se reconnaissent encore du FCC de Joseph Kabila et d’autres de la nouvelle majorité.
Selon Jean-Marc Kabund, premier vice-président de l’Assemblée nationale, treize des 16 groupes se disent de l’Union sacrée et trois du FCC, mais rien n’est sûr à ce stade. En effet, le FCC de l’ancien président de la République, Joseph Kabila, revendique 5 groupes parlementaires.
Pour débloquer la situation, le bureau de l’Assemblée nationale a envisagé la possibilité de convoquer la réunion de la conférence des présidents en s’appuyant sur l’ancienne configuration de l’Assemblée, afin de pouvoir convoquer une plénière le plus tôt possible.[16]

Le 24 mars, la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale a adopté l’avant-projet du calendrier des travaux de la session ordinaire de mars.
Cet avant-projet reprend quelques arriérés législatifs, les nouvelles matières, le contrôle parlementaire, le contrôle budgétaire, l’examen du rapport annuel de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) de 2012-2018 et aussi celui de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), l’audition et approbation du programme du gouvernement Sama Lukonde, l’investiture du nouveau gouvernement et le renouvellement du bureau de la CENI.
Parmi les matières figurent notamment la proposition de loi électorale déposée par le groupe des 13 personnalités (G13) et la loi sur l’organisation et fonctionnement de la commission électorale indépendante déposée depuis 2019 par le député Christophe Lutundula.
Voici la liste des matières à traiter:
+ Arriérés législatifs:
– Proposition de loi modifiant et complétant la loi n°011/02 du 24 décembre 2011, portant principes fondamentaux relatifs à l’agriculture, initiée par le député Elvis Mutiri;
– Proposition de loi portant principes fondamentaux relatifs à la protection et à la promotion des peuples autochtones pygmées,  initiée par le député Rubin Rachidi Bukanga;
– Proposition de loi portant organisation du référendum en RDC, initiée par le député  Lucain Kasongo;
– Proposition de loi déterminant les principes fondamentaux relatifs à l’exercice du droit de grève, initiée par le député Guy Mafuta Kabongo;
– Proposition de loi portant création, organisation et fonctionnement de l’ordre  des ingénieurs agronomes en République Démocratique du Congo, initiée par le député Modeste Kazwazwa;
– Proposition de loi organique portant protection et promotion des droits de personnes de troisième âge, initiée par  le député Dhedhe Mupasa;
– Proposition de loi portant création, organisation et fonctionnement de l’ordre national des sages-femmes, initiée par le député Eliezer Thambwe;
– Proposition de loi portant régime spécial de sécurité des agents publics de l’Etat, initiée par le député Maurice Ntambwe;
– Proposition de loi portant création, organisation et fonctionnement de l’ordre national des géologues, initiée par le député Garry Sakata;
– Proposition de loi modifiant la loi n° 18/021 du 26 juillet 2018 portant statut des anciens présidents de la République élus et fixant les avantages accordés aux anciens chefs de corps constitués, initiée par le député Jacques Djoli;
– Proposition de loi organique portant abrogation de loi-organique n°18/023 du 13 novembre 2018 portant institution, organisation et fonctionnement du conseil national de suivi de l’accord et du processus électoral, initiée par le député Delly Sesanga ;
– Proposition de loi modifiant et complétant le décret du 30 janvier 1940 portant code pénal (peines applicables aux infractions prévues par les actes uniformes de l’OHADA), initiée par le député Lucain Kasongo ;
– Proposition de loi portant modifiant et complétant le décret du 30 janvier 1940 portant code pénal (lutte contre la corruption), initiée par le député Jean-Pierre Pasi Zapamba ;
– Projet de loi autorisant la ratification de l’aménagement de Kigali au protocole de Montréal sur les substances qui appauvrissent la couche d’ozone, initié par le Gouvernement ;
– Projet de loi autorisant la ratification du protocole à la charte africaine aux droits des personnes handicapées en Afrique, initiée par le Gouvernement ;
– Projet de loi portant modalités d’application de l’état d’urgence et l’état de siège en République Démocratique du Congo, initiée par le gouvernement.
+ Nouvelles matières:
– Proposition de loi modifiant et complétant l’ordonnance-loi n°89-031 du 07 août 1989 portant création de la taxe de promotion de l’industrie, initiée par le député Boris Mbuku;
– Proposition de loi modifiant et complétant la loi électorale n°06/006 du 09 mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales telle que modifiée par la loi n°11/003/ du 25 juin 2011; la loi n°15/001 du 12 février 2015 et la loi n°17/013 du 24 décembre 2017, co-initiée par les députés  Delly Sesanga, Christophe Lutundula, Jacques Djoli, André Claudel Lubaya, Henri Thomas Lokondo, Jean-Jacques Mamba, Charles Makengo Ngombe, Patrick Muyaya, Juvénal Munubo et Jean-Marc Mambindi;
– Projet de loi portant reddition des comptes de la loi des finances 2020, que doit présenter le gouvernement.
Le calendrier a été adopté et sera soumis à l’appréciation de la plénière pour adoption.
Au cours de la réunion, les membres de la conférence des présidents ont aussi discuté de l’appartenance et du fonctionnement de certains groupes parlementaires après l’avènement de l’Union sacrée de la nation. «Nous nous sommes réunis dans l’ancienne configuration des présidents des groupes parlementaires et présidents des commissions. Cette question est complexe parce que, au sein des groupes parlementaires, beaucoup de membres ne partagent pas les mêmes opinions. Et dans certains groupes parlementaires, beaucoup de membres ont migré, beaucoup de membres ont quitté leurs groupes parlementaires pour l’Union sacrée», a dit Joseph Lembi Libula, rapporteur de l’Assemblée nationale.[17]

Le 29 mars, la plénière de l’Assemblée nationale a adopté son calendrier de la session ordinaire  de mars 2021. Selon le règlement intérieur, ce calendrier reste ouvert tout au long de la session. Les autres matières jugées urgentes peuvent y être ajoutées sur proposition de la conférence des présidents et adoption par la plénière souveraine.[18]

3. AU SÉNAT

a. L’adoption du calendrier de la session ordinaire de mars

Le 15 mars, au cours de l’ouverture de la session parlementaire de mars et au vu de la situation actuelle du pays, le président du Sénat, Modeste Bahati Lukwebo, a martelé sur l’urgence de la formation du gouvernement de l’Union sacrée. 67 Sénateurs sur un total de 109 étaient présents pour cette première plénière conduite sous la direction du nouveau bureau de l’Union Sacrée.[19]

Le 23 mars, la Conférence des présidents des groupes parlementaires du Sénat réunie sous la direction de Bahati Lukwebo a adopté l’avant-projet du calendrier de la session ordinaire de mars 2021. D’après Jean-Michel Kanyimbu, rapporteur du Sénat, cet avant-projet du calendrier devenu projet de calendrier a été adopté moyennant quelques amendements et sera soumis à la plénière pour adoption.[20]

Le 29 mars, la plénière du Sénat a adopté son calendrier des activités de la session ordinaire de mars. Parmi les matières retenues, figurent les arriérés législatifs, les nouvelles matières, le contrôle parlementaire, l’audition des rapports des missions, l’audition rapport-synthèse national des vacances parlementaires.
+ Parmi les arriérés législatifs, il y a notamment:
– proposition de loi organique portant création, organisation et fonctionnement de l’Agence nationale de lutte contre la corruption, proposition du feu député  Henry Thomas Lokondo(en seconde lecture);
-projet de loi autorisant l’adhésion de la République démocratique du Congo à la constitution de la commission africaine de l’aviation civile du 16 décembre 2009.
+ Parmi les nouvelles matières, figurent:
– proposition de loi sur la transplantation d’organes, de tissus et de  cellules du corps humain, proposition du sénateur Kaumba Lufunda;
-proposition de loi sur le trafic des stupéfiants, substances psychotropes et précurseurs, initiée par le sénateur Jean-Laury Lilongo Botshili;
-proposition de loi déterminant les principes fondamentaux relatifs à la recherche scientifique et à l’innovation technologique, initiée par le sénateur Guy Loando Mboyo.
Ce calendrier reste ouvert pour ajouter d’autres matières.
Dans son discours d’ouverture de la session, le Président du Sénat Bahati Lukwebo avait annoncé des réformes institutionnelles que le parlement et le gouvernement doivent initier pour booster le développement de la République Démocratique du Congo.
Ces réformes, disait-il, concernent entre autres le processus électoral et sa transparence, la gouvernance des provinces, la nationalité, le climat des affaires, la sécurité judiciaire et la programmation des investissements dans les secteurs-clé, notamment l’agriculture, la pêche, l’élevage, l’industrie, les hydrocarbures, l’énergie, les infrastructures, l’environnement, la culture, le tourisme, les télécommunications.[21]

Le 29 mars, lors de la plénière, les sénateurs ont pris acte de la démission du premier vice-président Samy Badibanda Ntita. Ce, à la suite de la lecture de sa lettre de démission par le rapporteur adjoint de cette chambre, Nathalie Bul’an’sung Sanata qui a précisé: «la lettre de démission de l’ancien premier vice-président est conforme aux dispositions de l’article 28 de notre règlement intérieur, selon lequel les fonctions des membres du bureau du sénat prennent fin par démission. Le pourvoi à la vacance créé à ce poste, figurera à l’ordre du jour de nos prochaines séances plénières». Samy Badibanda Ntita avait démissionné quelques minutes après l’entrée en fonction du nouveau bureau du Sénat chapeauté actuellement par Bahati Lukwebo.[22]

[1] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 22.02.’21; Patient Ligodi – RFI, 28.02.’21
[2] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 02.03.’21
[3] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 14.03.’21
[4] Cf Politico.cd, 14.03.’21; Hervé Pedro – Politico.cd, 15.03.’21; Actualité.cd, 19.03.’21
[5] Cf Prince Mayiro – 7sur7.cd, 25.03.’21
[6] Cf Prince Mayiro – 7sur7.cd, 26.03.’21
[7] Cf Ivan Kasongo – Actualité.cd, 27.03.’21; Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 27.03.’21
[8] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 29.03.’21
[9] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 15.03.’21; Berith Yakitenge – Actualité.cd, 15,03,’21
[10] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 15,03,’21
[11] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 15.03.’21
[12] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 15,03,’21
[13] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 16.03.’21; Roberto Tshahe – 7sur7.cd, 16.03,’21
[14] Cf Actualité.cd, 16.03.’21
[15] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 17.03.’21
[16] Cf Patient Ligodi – RFI. 23.03.’21
[17] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 25 et 27.03.’21
[18] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 29.03.’21
[19] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 15.03.’21
[20] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 24.03.’21
[21] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 29.03.’21
[22] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 30.03.’21