Congo Actualité n. 363

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: APRÈS LA PUBLICATION DES LISTES PROVISOIRES DES CANDIDATS AUX ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES ET LÉGISLATIVES NATIONALES
1. L’OPPOSITION
a. Après la désignation du candidat du FCC
b. À propos d’une candidature commune pour les élections présidentielles
2. LE CAS MOÏSE KATUMBI
a. Les appels à faveur de son retour
b. Un mandat d’arrêt international
c. Une information judiciaire ouverte en Belgique pour « faux » dans son passeport
3. LA LETTRE DU CLC AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU
4. LES LISTES PROVISOIRES DES CANDIDATS AUX ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES ET LÉGISLATIVES NATIONALES
a. Avant la publication
b. La publication des listes par la Commission électorale
c. Les premières réactions

ÉDITORIAL: APRÈS LA PUBLICATION DES LISTES PROVISOIRES DES CANDIDATS AUX ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES ET LÉGISLATIVES NATIONALES

1. L’OPPOSITION

a. Après la désignation du candidat du FCC

Le 13 août, dans une déclaration commune publiée dans la soirée, Félix Tshisekedi (UDPS), Vital Kamerhe (UNC), Eve Bazaiba (MLC), Pierre Lumbi (Ensemble pour le changement), Freddy Matungulu (Congo na Biso) et Christophe Lutundula (Dynamique de l’Opposition) ont salué la position de Joseph Kabila – pas partant pour un troisième mandat – qui a accepté enfin de se plier à la constitution. Pour l’opposition, c’est une victoire historique que vient de remporter le peuple congolais. Mais ce n’est qu’une victoire d’étape, soulignent-ils. Reste, en effet, le combat pour des élections conformes aux normes démocratiques, des élections telles que prévues dans l’accord de la Saint Sylvestre. Et ici les signataires insistent sur la mise en œuvre intégrale de cet accord, obtenu grâce à la médiation des évêques catholiques.
Pour des élections inclusives, l’opposition exige le retour de Moïse Katumbi au pays; la libération des prisonniers politiques, dont Jean Claude Muyambo, Eugène Diomi Ndongala et les militants pro démocratie de Filimbi et de Lucha; le retrait de la machine à voter; l’extirpation des électeurs présumés fictifs, estimés à près de 10 millions sur plus de 40 millions d’enrôlés, du fichier électoral; le retour de la dépouille mortelle de l’opposant historique Etienne Tshisekedi; le remplacement du délégué de l’Udps à la Commission électorale. Le pouvoir devra se garder aussi d’instrumentaliser la Céni et la justice pour procéder à l’invalidation des candidats de l’opposition.
Enfin, les leaders de l’opposition ont réitéré leur volonté à poursuivre les discussions pour la désignation d’une candidature commune de l’opposition à la présidence de la République. [1]

Le 13 août, le secrétaire général de la plateforme Ensemble pour le changement et président du parti politique Envol, Delly Sesanga,  a affirmé que la désignation du candidat du Front Commun pour le Congo (FCC), qui implique la non-représentation de Joseph Kabila aux prochaines élections n’est pas un cadeau, mais une victoire conquise par le peuple congolais et celui-ci doit rester débout pour obtenir des élections inclusives, transparentes et crédibles. Pour lui ces élections se feront sans machine à voter et sans les 10 millions d’électeurs considérés comme fictifs: «Pour le moment, il y a de la désinformation qui consiste à considérer que nous avons une démocratie octroyée, que Joseph Kabila a fait un cadeau au peuple. C’est un droit que nous avons conquis de hautes luttes et la mémoire de tous nos martyrs est encore fraiche pour pouvoir dire que nous allons nous battre pour arriver à la solution finale».[2]

b. À propos d’une candidature commune pour les élections présidentielles

À propos d’une candidature commune de l’opposition pour les élections présidentielles, le président du Mouvement de Libération du Congo (MLC), Jean-Pierre Bemba, a affirmé que la candidature unique de l’opposition est «nécessaire et absolue» pour prétendre gagner les élections: «L’unité de l’opposition est nécessaire et absolue. Nous sommes dans un système d’élection à un seul tour c’est-à-dire, celui qui va obtenir le plus grand nombre de pourcentage sera élu. J’ai commencé à rencontrer les leaders de l’opposition. L’idée c’est de parler des principes et pas parler des hommes dans un premier temps. Le principe c’est l’unité de l’opposition. Et en deuxième temps, comment choisir le candidat qui pourra représenter l’opposition à l’élection présidentielle».
À l’issue d’une rencontre avec Félix Tshisekedi et Jean-Pierre Bemba, le président de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), Vital Kamerhe, a affirme que la question de la candidature commune est un «engagement» qu’ils ont pris.
Le président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), Félix Tshisekedi, s’est également prononcé à faveur d’une candidature unique de l’opposition et a annoncé une nouvelle rencontre entre opposants au mois de septembre.
La plateforme Ensemble pour le changement s’est montrée également favorable à l’idée d’une candidature unique de l’opposition, pourvu que Moïse Katumbi participe aux élections.[3]

Pour le Secrétaire général de Ensemble pour le Changement, plateforme qui soutient la candidature de Katumbi à la présidentielle, la candidature commune doit puiser son fondement sur cinq critères indispensables. À ce propos, Delly Sesanga a affirmé que «la candidature commune doit être la résultante d’un processus politique qui conduit aux élections libres, démocratiques, transparentes, apaisées et inclusives. Si tous ces 5 critères sont remplis, alors il y aura lieu de pouvoir aller vers une candidature commune», en soulignant que, «en dehors de l’inclusivité, parler de la candidature commune ce serait mettre la charrue devant les bœufs». Pour le président de Envol, accepter que le pouvoir en place exclue des candidats, c’est méconnaître le droit du libre choix de nos concitoyens.
Selon lui, au nom du principe de l’inclusivité exigé par l’accord de la Saint Sylvestre, il faut d’abord se battre pour l’entrée de Moise Katumbi dans le processus électoral.[4]

Le 22 août, le secrétaire général de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), Jean Marc Kabund, a déclaré que son parti n’est pas opposé à l’idée d’une candidature unique de l’opposition. Pour lui, l’opposition aura plus de chance de l’emporter si elle se range derrière un seul candidat. Comme secrétaire général de l’UDPS, Jean-Marc Kabund a déclaré qu’il souhaite que Félix Tshisekedi, président de son parti, soit désigné candidat unique de toute l’opposition. Selon certaines sources, il aurait même affirmé que «l’UDPS ne soutiendra pas autre candidat à la présidentielle que Félix Tshisekedi».[5]

Le 24 août, au cours d’une interview accordée à RFI, Moïse Katumbi a annoncé qu’il soutiendra le candidat commun choisi par l’opposition, au cas où il ne parvenait pas à déposer sa candidature. Cependant, il a dit de continuer à se battre pour se porter candidat au nom d’Ensemble pour le Changement, sa plateforme électorale.[6]

2. LE CAS MOÏSE KATUMBI

a. Les appels à faveur de son retour

En exil, Moïse Katumbi n’a pas pu rentrer au Pays, ce qui l’a empêché de déposer à temps sa candidature à l’élection présidentielle.
Le secrétaire général d’Ensemble, Delly Sessanga, a accusé le président Joseph Kabila non seulement d’avoir instruit l’Autorité de l’aviation civile de refuser l’autorisation d’atterrissage de l’avion de Katumbi à l’aéroport de Lubumbashi, mais aussi d’avoir instruit la Direction Générale de Migration (DGM) de ne pas autoriser Katumbi de traverser la frontière congolaise de Kasumbalesa, en provenance de la Zambie.
Selon le porte parole du Gouvernement, Lambert Mendé, à propos de l’interdiction d’atterrir à Lubumbashi, Moïse Katumbi aurait «produit un fac-similé, qui ne contient aucun accusé de réception», d’une lettre adressée à l’autorité de l’aviation civile, mais «que personne n’a vue». Le ministre conteste aussi tout empêchement d’une traversée de la frontière de Kasumbalesa: «il n’a à aucun moment traversé la zone neutre pour se présenter à nos agents de la douane ou de l’immigration pour solliciter une entrée en territoire congolais. Mais il a été raconté partout qu’il a demandé une autorisation d’atterrissage qui lui aurait été refusée, ce qui est faux, et qu’on lui aurait interdit d’entrer dans le territoire congolais, ce qui est faux aussi puisque, dans un cas comme dans l’autre, il n’a formulé aucune demande». Selon Lambert Mende, le discours de Moïse Katumbi ne serait donc que «du pipeau pour dramatiser sa situation, politiser ses ennuis judiciaires et éviter d’avoir à répondre des problèmes qu’il a avec le procureur général de Lubumbashi».
Pour le porte-parole de la Majorité présidentielle, André-Alain Atundu, l’ancien gouverneur du Katanga ne s’est pas présenté au bureau de l’immigration congolaise de Kasumbalesa. «Moïse Katumbi ne s’est jamais présenté au poste-frontière de Kasumbalesa, car il n’a pas eu le courage politique d’affronter le sort qui l’attendait», a-t-il dit dans une interview à Jeune Afrique.[7]

Le 9 août, les avocats de Moïse Katumbi ont déposé  deux requêtes en référé (procédure d’urgence)  auprès du premier président du Conseil d’État, Felix Vunduawe.
La première porte sur sa liberté d’aller et venir en RDC. Katumbi sollicite du premier président du conseil d’État de lever toutes les mesures administratives lui interdisant d’entrer sur le territoire et d’y circuler librement.
Quant à la deuxième requête, elle porte sur les mesures « conservatoires » qui permettraient à Katumbi de déposer sa candidature à la CENI. À travers cette requête, Moïse Katumbi demande au 1er président du Conseil d’État d’ordonner à la CENI de recevoir sa candidature, étant donné qu’il s’agit d’un droit garanti par la constitution.[8]

Le 13 août, dans une déclaration commune publiée dans la soirée, les principaux leaders de l’opposition: Félix Tshisekedi (UDPS), Vital Kamerhe (UNC), Eve Bazaiba (MLC), Pierre Lumbi (Ensemble pour le changement), Freddy Matungulu (Congo na Biso) et Christophe Lutundula (Dynamique de l’Opposition) ont exigé le retour “immédiat” de l’opposant Moïse Katumbi qui, empêché par les autorités congolaise de rentrer au pays, n’a toujours pas déposé sa candidature à l’élection présidentielle. Selon les responsables de l’immigration zambienne, le gouvernement de Kinshasa n’a pas voulu le recevoir sur le territoire congolais, au motif que sa présence aurait risqué de provoquer des troubles.[9]

Le 13 août, le secrétaire général de la plateforme Ensemble pour le changement et président du parti politique Envol, Delly Sesanga,  a affirmé qu’il n’y a pas d’élection crédible sans inclusivité et sans la participation de Moise Katumbi comme candidat. Il a appelé à la mobilisation générale, notamment à des manifestations dans toutes les provinces, pour exiger le retour de Moïse Katumbi et sa participation aux élections comme candidat à la Présidence de la République. Selon Sessanga, «la liberté du choix électoral de chaque citoyen implique l’inclusivité et la présentation de toutes les offres politiques. Pour cela, nous allons donc continuer le combat pour le retour de Moise Katumbi».[10]

Le 18 août, le leader du MPCR, Jean Claude Vuemba, a appelé les candidats de l’opposition à ne pas accepter d’aller aux élections générales de décembre prochain si l’opposant Moïse Katumbi en est exclu. «Pas d’élections sans Katumbi», a-t-il dit. L’élu de Kasangulu dénonce le plan diabolique ourdi par le pouvoir pour bloquer Katumbi. Pour lui, il n’est pas question d’aller aux élections si il n’y a pas d’inclusivité. Selon lui, le retour de Katumbi est obligatoire mais surtout très nécessaire pour la désignation du candidat commun de l’opposition. Vuemba a estimé que «empêcher Katumbi, c’est empêcher 30 % des congolais qui le soutiennent avant même les élections».
Par ailleurs, il a redit son rejet de la machine à voter. «C’est la machine à tricher. On ne va pas l’accepter et ça ne passera pas», a-t-il expliqué, en rappelant aussi que plus de 10 millions d’enrôlés sans empreinte digitale se trouvent dans le fichier qu’il qualifie de «corrompu».[11]

On peut rappeler que les plusieurs annonces (au moins 4 ou 5) et les quelques tentatives de retour entrepris par le même Moïse Katumbi n’ont, jusqu’ici, donné aucun résultat positif.
Une première tentative de retour il l’avait déjà entreprise le 31 juillet 2016, pour participer, à Kinshasa, au meeting d’Etienne Tshisekedi, leader charismatique de l’opposition, de retour dans la République Démocratique du Congo, après une période de soins médicaux en Belgique. Moïse Katumbi avait prévu de faire le voyage à bord d’un avion privé, mais il n’avait pas été autorisé à survoler l’espace aérien congolais et à atterrir à l’aéroport de Kinshasa.
Le 9 février 2017, il avait annoncé son retour à Kinshasa, pour participer au rapatriement des dépouilles et les funérailles d’Etienne Tshisekedi, décédé en Belgique le 2 février 2016. Puisque le corps de Etienne Tshisekedi n’a pas été rapatrié et les funérailles n’ont pas eu lieu, Moïse Katumbi avait dû reporter son retour.
Sa dernière tentative de retour remonte au 3 août 2018, quand il a essayé d’atteindre Kinshasa, via Lubumbashi, pour présenter à la Commission électorale le dossier de sa candidature à la prochaine élection présidentielle. Encore une fois, après avoir planifié son retour à bord d’un avion privé, il n’a pas reçu l’autorisation d’atterrissage à l’aéroport de Lubumbashi.

b. Un mandat d’arrêt international

Le 16 août, le ministre de la Communication et des Médias et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende Omalanga, a affirmé qu’un mandat d’arrêt international a été émis contre Moïse Katumbi. Ce mandat d’arrêt émis par le parquet général fait suite à la condamnation de Moïse Katumbi, en 2016, dans une affaire de spoliation. Selon le ministre Mende, ce cas n’entre pas dans le cadre de décrispation du climat politique: «Ça n’a rien à voir avec la décrispation. Cela a déjà été dit, le comité des hauts magistrats que nous avons consulté ont exclu formellement les personnes fugitives de cette décrispation».[12]

Le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, a confirmé que Moïse Katumbi fait l’objet d’un mandat d’arrêt international lancé par le procureur général de la République. Il a expliqué que «le parquet général a émis un mandat d’arrêt international contre M. Katumbi. Ce mandat a été émis et il reste en vigueur. Il a été communiqué à un certain nombre de pays tant africains qu’européens. Les autorités congolaises n’ont pas empêché Moïse Katumbi d’entrer en RD Congo. Pour la justice congolaise, M. Katumbi est un fugitif et il doit être arrêté dès qu’il sera sur le territoire national. Cette position là n’a pas changé. Le déploiement de la police à la frontière de Kasumbalesa avait été fait pour l’arrêter. M. Katumbi savait très bien que, en arrivant sur le territoire congolais, il aurait été immédiatement arrêté. Les agents de police qui étaient à Kasumbalesa [frontière zambienne] avaient pour mission de l’arrêter. Ils étaient en nombre parce que, du côté des militants de Monsieur Moïse Katumbi, plusieurs avaient prévu de créer des troubles à la frontière».[13]

Le secrétaire général de la plateforme Ensemble, Delly Sessanga a affirmé que le mandat d’arrêt international émis par le parquet général contre Moïse Katumbi est un «théâtre de mauvais goût». Pour lui, le gouvernement qui a empêché Moïse Katumbi de rentrer dans son pays ne peut pas demander aux autres pays de l’arrêter. «Voilà qu’un gouvernement qui a pris la poudre d’escampette pour arrêter un soit disant fugitif, veut s’en remettre à des gouvernements étrangers pour exécuter ce qu’eux-mêmes n’arrivent pas à faire. C’est de l’acharnement», a-t-il déclaré.[14]

Le porte-parole de la plateforme pro-Katumbi, Ensemble pour le changement, Christophe Lutundula Apala, a de sa part assuré que «l’attitude du ministre de la Justice est contraire à la décrispation politique que le peuple congolais et la communauté internationale réclament pour de bonnes élections. En réalité, sa déclaration prouve la panique dans laquelle se trouve la famille politique de Joseph Kabila face à la candidature tant redoutée de Moïse Katumbi».
Christophe Lutundula a aussi dénoncé l’acharnement tant judiciaire que politique, dont fait face Moïse Katumbi Chapwe de la part du pouvoir en place. S’agissant du mandat d’arrêt international lancé contre Katumbi, Christophe Lutundula a souligné le caractère non objectif de cette démarche: «Relevons qu’un tel mandat ne repose sur aucune raison objective, car non seulement Moïse Katumbi n’est pas un fugitif, mais aussi toutes les procédures judiciaires fantaisistes ouvertes contre lui sur ordre de Monsieur Kabila sont en cours et n’ont pas encore fait l’objet d’un jugement irrévocable de condamnation». Moïse Katumbi a été condamné par la justice dans une affaire de spoliation d’immeuble. Il est également accusé de recrutement de mercenaires et d’avoir une double nationalité.[15]

c. Une information judiciaire ouverte en Belgique pour « faux » dans son passeport

Le 27 août, la justice belge a ouvert une information judiciaire sur certaines irrégularités du passeport de Moïse Katumbi, l’homme d’affaires et candidat déclaré à l’élection présidentielle en RDC. «Je confirme que le Parquet vient d’ouvrir une information judiciaire à l’encontre de Moïse Katumbi pour « faux en écriture publique »», a affirmé Gilles Blondeau, substitut du procureur du Roi au Parquet de Halle-Vilvoorde. En cause: «Une partie de son passeport a été estimée comme un faux».
L’affaire remonte au 14 juin 2018. Moïse Katumbi vient d’atterrir à l’aéroport de Bruxelles, dans un avion privé, en provenance d’Israël. Lors d’un contrôle de police, son passeport est saisi. Il présente une irrégularité. La page sur laquelle figurent les données d’identité de l’intéressé n’est pas l’original, explique l’Office des étrangers en Belgique. «La page d’identité de [son] passeport n’est pas authentique. L’originale a été changée et remplacée par une autre», avait alors précisé Dominique Ernould, porte-parole de l’Office des étrangers, une administration placée sous la tutelle du ministère belge de l’Intérieur. L’organisme, que la police contacte dans ce genre de situation, décide, malgré tout, de délivrer un laissez-passer à Moïse Katumbi pour lui permettre d’entrer sur le territoire belge. Il a alors quinze jours pour fournir aux autorités belges un document de voyage officiel et authentique. Mais quinze jours plus tard, pas de régularisation. L’Office des étrangers confie donc le dossier à la justice. Le parquet de Halle-Vilvoorde, dans la région de Bruxelles, est saisi. Le substitut du procureur, Gilles Blondeau, a confirmé que, suite à son interpellation, la police fédérale lui avait confisqué son passeport avant de le transmettre au Parquet de Halle-Vilvoorde: «Le passeport en question avait été confisqué. Nous le détenons toujours. Vu qu’il a été falsifié, il ne sera pas rendu à l’intéressé». Cela n’a, semble-t-il, pas empêché Moïse Katumbi de voyager à l’étranger, notamment lors de la finale de la Coupe du monde, le 15 juillet dernier à Moscou, ou sur le continent africain au cours des dernières semaines.[16]

3. LA LETTRE DU CLC AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU

Le 22 août, dans une lettre adressée au Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guterres, le Comité Laïc de Coordination (CLC)
«1. a noté avec satisfaction le renoncement du Président Joseph Kabila à un troisième mandat présidentiel, du reste inconstitutionnel. Il regrette cependant qu’il ait fallu le sacrifice des centaines de morts et de blessés ainsi que des arrestations et détentions arbitraires massives, qui auraient pu être évitées …
3. Le CLC relève cependant que beaucoup reste encore à faire. Les questions encore pendantes sont les suivantes: la violation du principe d’inclusivité, le non respect du consensus national et l’inféodation de la CENI et de l’appareil judiciaire au pouvoir en place.
4. Alors que la nécessité d’organiser des élections inclusives a toujours été affirmée dans l’Accord de la Saint-Sylvestre comme un impératif incontournable, acceptée tant par la Communauté nationale qu’internationale, le Président Joseph Kabila continue d’exclure délibérément certains acteurs politiques de l’opposition et de la société civile. Tel est le cas de Moïse Katumbi. De plus, il s’efforce d’écarter de la compétition électorale certains autres candidats à l’élection présidentielle, comme Jean-Pierre Bemba dont l’invalidation a déjà été annoncée par le porte-parole de la Majorité Présidentielle, lors de l’une de ses conférences de presse, s’attribuant ainsi les prérogatives de la CENI et de la Cour Constitutionnelle. Par ailleurs, des sources concordantes font également état des tentatives de mise en place des stratégies d’exclusion de la candidature de Félix Tshisekedi des listes électorales
L’exclusion de Moïse Katumbi, celle programmée de Jean-Pierre Bemba, de Félix Tshisekedi ou de tout autre citoyen congolais qui remplit les conditions requises d’éligibilité, est de nature à embraser le pays et l’ensemble de la sous-région.
5. Le consensus national incarné par l’Accord de la Saint-sylvestre n’est d’application que de manière biaisée et sélective, suivant le bon vouloir de la Majorité Présidentielle pourtant signataire dudit Accord. Et cette situation ne garantit nullement le respect de l’égalité des chances dans la compétition électorale prévue.
Les mesures de décrispation politique, jugées comme préalables incontournables pour des élections apaisées attendent encore d’être mises en œuvre. La monopolisation des médias publiques par une seule famille politique et la fermeture des médias privés demeurent préoccupantes. Aucune mesure d’élargissement des prisonniers politiques emblématiques, comme Eugène Diomi Ndongala, Jean-Claude Muyambo ou Franck Diongo, n’a été arrêtée, comme le réclame cet Accord.
6. L’inféodation de la Commission Electorale Nationale Indépendante au pouvoir en place demeure fort préoccupante. Instrumentalisée à souhait, elle reste sourde à tous autres conseils et recommandations, tant de la part de la communauté nationale qu’internationale.
A titre illustratif, on fait, entre autres, les deux constats suivants:
– La Loi électorale n’a pas prévue le recours à la machine à voter. Dans son calendrier électoral, publié le 5 novembre 2017, la CENI avait même programmé, du 20 septembre au 6 octobre 2018, les préparatifs techniques de l’impression des bulletins de vote. Ceux-ci sont censés être imprimés, du 7 octobre au 15 novembre et distribués du 16 novembre au 5 décembre 2018 dans les différents bureaux de vote. Alors qu’on est dans les délais, la CENI s’entête à imposer des machines à voter.
– La publication et le nettoyage du fichier électoral, maintes fois réclamés, n’ont jamais été réalisés. L’audit effectué par l’Organisation Internationale de la Francophonie a relevé de très graves faiblesses dans ce fichier, notamment le manque d’empreintes digitales pour 16,6 % soit six millions sept cent mille d’enrôlés (6,7 millions) et des millions de cartes vierges portées disparues, sans oublier le cas des 498.345 enrôlés qui n’auront pas l’âge de voter (18 ans), le 23 décembre 2018. Le refus de remédier à cette situation passe pour une preuve irréfutable de l’existence d’un agenda caché à la base de ces anomalies.
7. L’instrumentalisation de la Justice, des Forces de Police, de l’Armée et des Services de Sécurité à des fins partisanes au profit de la Majorité Présidentielle fait l’objet du lot quotidien qui ne garantit pas la jouissance équitable de la justice électorale
La Cour Constitutionnelle, par sa loi organique, son Règlement intérieur et sa reconfiguration, fait déjà craindre de sa partialité dans le traitement des futurs contentieux électoraux.
Si toutes ces équations ne sont pas résolues dans les jours qui viennent, elles constitueraient en elles-mêmes, les germes de conflit qui, inéluctablement, conduiraient vers une crise généralisée, pouvant plonger le pays ainsi que la sous-région dans le chaos.
9. Voilà pourquoi, avec insistance, le CLC invite une fois de plus la Communauté internationale, en particulier les Nations Unies, l’Union Africaine, l’Union Européenne, la SADC, la CEEAC et la CIRGL, à accentuer leurs efforts pour qu’aucun acteur politique ne soit exclu du processus électoral, que la machine à voter soit retirée, que le fichier électoral soit nettoyé et que toutes les mesures de décrispation politique soient réellement d’application. Tout cela avant le 19 septembre 2018, date de la publication des listes définitives des candidats présidents et députés nationaux.
– Si ces dispositions ne sont pas remplies, le CLC se verra dans l’obligation de poursuivre jusqu’au bout son combat non violent pour le respect des règlements, en vue d’une alternance démocratique et pacifique.
Puisque le Président Kabila, son gouvernement et la haute direction de la CENI sont devenus, par leur partialité, des obstacles majeurs à la tenue des élections crédibles en RDC, il s’agira de:
– exiger qu’ils soient déchargés, toutes affaires cessantes, de leurs prérogatives dans la gestion du processus en cours;
– solliciter des Nations-Unies et de l’Union Africaine d’assurer le parachèvement de ce processus électoral, en collaboration avec une expertise congolaise exempte de toute ambition électorale et ayant un sens d’abnégation confirmée».[17]

4. LES LISTES PROVISOIRES DES CANDIDATS AUX ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES ET LÉGISLATIVES NATIONALES

a. Avant la publication

Le 15 août, le Ministère de la Justice a demandé au procureur général près la Cour de cassation de poursuivre tous les candidats aux élections générales du 23 décembre 2018 ayant une nationalité étrangère. Le gouvernement a signalé que ses services compétents ont fait parvenir à la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) la liste, pas complète, des personnes détenant la nationalité étrangère pour que celles-ci soient invalidées à la présidentielle et aux législatives nationales et provinciales de décembre prochain.
L’opposition crie à l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques pour écarter les opposants de la course à la présidentielle.
Pour rappel, en RDC, la nationalité est une et exclusive. Elle ne peut être détenue concurremment avec une autre. En cas d’acquisition d’une nationalité étrangère, on perd automatique celle congolaise. Le recouvrement de la nationalité congolaise n’est pas automatique. Il y a une procédure à suivre devant le ministère de la justice. Pour se présenter comme candidat à la présidentielle ou aux législatives nationales et provinciales, il faut détenir la nationalité congolaise.[18]

Le 21 août, s’exprimant sur la question de la double nationalité, le sénateur Jacques Djoli estime que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) ne doit pas se faire instrumentaliser par un ministre. Pour Jacques Djoli la Commission électorale ne peut pas non plus se substituer au tribunal pour trancher sur la nationalité des candidats aux élections et chercher à les exclure du processus. Selon Jacques Djoli, «c’est un travail des juges du contentieux … La CENI ne peut pas se transformer en tribunal ou recevoir une liste d’un ministre … C’est devant les Cours et tribunaux qu’on devra démontrer qu’une personne n’a pas la nationalité congolaise. La CENI étant une entité administrative vérifie la recevabilité et l’éligibilité sur base des pièces versées dans le dossier du candidat. Parmi ces pièces, il y a notamment le certificat de nationalité».[19]

Le 24 août, dans un communiqué signé dans la soirée, avant même que la Ceni n’annonce les listes provisoires des candidats aux élections présidentielles et législatives nationales, 7 candidats à la présidentielle ont demandé à la Commission électorale de ne pas céder aux injonctions politiques visant à exclure certains candidats à la présidentielle. Les signataires de ce communiqué sont Félix Tshisekedi, Jean Pierre Bemba, Moïse Katumbi, Martin Fayulu, Adolphe Muzito, Freddy Matungulu et Jean Mabaya. Ces candidats de l’opposition «tirent la sonnette d’alarme sur les manipulations flagrantes en cours visant à vider le scrutin de leur essence démocratique». En effet, l’opposition affirme être «en possession d’éléments attestant que le pouvoir en place, par l’entremise du ministre de la Justice et de cadres de la majorité, a donné des injonctions à la Ceni dans le but d’exclure plusieurs candidats de l’opposition, dont Jean-Pierre Bemba et Félix Tshisekedi, du processus électoral et ce après en avoir exclu Moïse Katumbi». Enfin, l’opposition lance un «appel à la mobilisation générale du peuple congolais afin de résister à cette provocation de trop» de la part d’un pouvoir qualifié de «dictatorial».[20]

b. La publication des listes par la Commission électorale

Le 24 août, tard dans la nuit, la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) a publié la liste provisoire des candidats pour la présidentielle et les législatives nationales.
Sur les 25 candidatures reçues par la CENI pour la présidentielle, 19 ont été déclarées recevables, 6 irrecevables.
Les candidatures jugées recevables:
Tshisekedi Tshilombo Felix (UDPS/Tshisekedi),
Kamerhe Lwa kanyinginyi Vital (UNC),
Fayulu Madidi (Dynamique de l’Opposition),
Matungulu Mbuyamu Freddy (SYENCO),
Ramazani Shadary Emmnauel (Indépendant),
Kin-kiey Mulumba (Indépendant),
Kikuni Seth (Indépendant),
Kazadi Ngumbe Ngumbe (FPJ),
Ngoy Ilunga wa Nsenga Theodore,
Maluta Joseph (Indépendant),
Tshiani Noel (Indépendant),
Mabaya Gizi Amine (ACC),
Shekombe Alain Daniel (Indépendant),
Radjabo Sokorabo,
Mpunga Mbomba Yves (FP),
Mokia Gabriel (MDCO),
Masheke Sylvain (Indépendant),
Luntadila Diavena Charles et
Mvemba Francis (Indépendant)
Alors que les rumeurs couraient sur une éventuelle invalidation de la candidature de Félix Tshisekedi pour faux diplômes, elle a finalement été validée.
Les candidatures jugées irrecevables:
– Jean-Pierre Bemba (MLC), suite à sa condamnation à un an de prison et à un paiement de 30.000 euros d’amende par la Cour pénale internationale pour subornation des témoins;
– Samy Badibanga et Marie-Jose Ikofu, pour défaut de nationalité d’origine;
– Aldophe Muzito, pour conflit avec son parti, le parti lumumbiste unifié (PALU);
– Antoine Gizenga, pour défaut de signature et
– Jean-Paul Moka, pour défaut des preuves du paiement de la caution.
Les personnes dont les candidatures ont été déclarées irrecevables disposent de 48 heures pour contester la décision de la CENI auprès de la Cour constitutionnelle.[21]

La commission électorale nationale indépendante a déclaré recevables 15.222 candidatures aux législatives nationales sur les 15.505 reçues. Par contre 283 candidatures ont été déclarées irrecevables, en raison de candidatures multiples ou non conformes aux conditions d’éligibilité en application des dispositions des articles de la loi électorale.
La CENI renseigne par ailleurs que les listes provisoires des députés nationaux seront affichées aux secrétariats exécutifs provinciaux et antennes à partir de ce samedi 25 août. Elles seront également disponibles sur son site web : www.ceni.cd.
Les contestations relatives à la validité des candidatures sont portées devant la Cour constitutionnelle dans les cinq jours suivant la publication de la décision de la CENI.
La Cour constitutionnelle dispose d’un délai de dix jours ouvrables pour rendre ses décisions. La CENI rendra publiques les listes définitives le 19 septembre, en application des articles 27 et 108 de la loi électorale.[22]

La Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) a déclaré inéligibles aux législatives nationales
– 13 candidatures, dont 11 hommes et 2 femmes, pour détention d’une nationalité étrangère. Il s’agit de Patrick Bologna (ACO/MP), Henriette Wamu soutien de l’UDPS/Tshisekedi, José Endundo (G7), Jean Claude Baende (MP), Alex Kande (MP), Lambert Matuku Memas (PALU), Vincent Kangulumba (PaLu), Willy Mishiki (Unana), Olivier Endundo (Ensemble) et Nkere Ntanda. Parmi eux, la plupart siègent déjà dans l’Assemblée nationale actuelle, dont Henriette Wamu, Patrick Bologna, José Endundo, ou encore Vincent Kangulumba ancien secrétaire général du gouvernement.
– 4 candidatures, pour «condamnation à une peine irrévocable prévue dans l’article 10, alinéa 1 points 1, 2 et 3 de la Loi électorale». Il s’agit de: Mukenge Yamba Barthelemy (Action pour l’unité, Demba), Babala Wandu Fidele (MLC, N’djili), Undji ‘Yangya Wicibangyela Philippe (Alliance des Forces Démocratiques du Congo et Alliés, Fizi) et Mbuze Agwabi Thierry (AMK, Libenge).
– 5 candidatures, pour «dissimulation d’une profession déclarée comme inéligible ou nécessitant la production d’une demande de mise en disponibilité, conformément à l’article 10 alinéa 1 points 5 et 10 de la Loi électorale». Il s’agit de: Ikiyo Ingutu Yokanga (Alliance Pour L’avenir, Ingende), Ifemo Basele Marie-Caroline (Alliance Des Progressites Pour Le Congo (Lukunga), Olengha Emery Patrice (Amk, Funa), Basimike Mushengezi Nessy (Afdc, Walungu) et Namufakage Kaboyi (Dynamique de l’Opposion, Walungu).
– 4 candidatures, pour manque de «preuve de paiement de frais exigés pour le dépôt de candidature». Tous représentent l’Alliance Pour l’Alternance au Sud-Ubangi, précisément à Kungu: Moloko Mbonzi Louison, Mombenza Embonga Aimé, Manzenge Mwanasuka Flory et Bamotanga Toebonda.
– 101 candidatures (dont 10 femmes), pour «dépôt de dossiers de candidature dans plusieurs circonscriptions pour le compte de différents partis ou regroupements politiques (Article 21 alinéa 1 points 3 et 4 de la Loi électorale)».[23]

c. Les premières réactions

La secrétaire générale du MLC, Eve Bazaiba, a été la première à réagir à l’annonce de l’invalidation de la candidature de Jean-Pierre Bemba. A ses yeux, la candidature de Jean-Pierre Bemba « faisait trembler la Kabilie au point d’instrumentaliser la Ceni en vue de l’écarter ». Elle affirme que le ministre de la Justice avait envoyé une lettre « assortie de la liste des noms des personnes que Kabila ne voulait pas voir postuler».
Les partisans de Jean-Pierre Bemba considèrent en effet qu’il avait le droit de se présenter.
Certes, il a été reconnu coupable par la CPI de subornation de témoins. Certes, la loi électorale prévoit l’invalidation de tout candidat condamné par un jugement irrévocable de corruption. Mais, pour le MLC, corruption et subornation de témoins sont deux délits différents dans le code pénal congolais. Pour Eve Bazaiba, «D’une part, Jean Pierre Bemba a été acquitté totalement du crime de guerre et du crime contre l’humanité et, d’autre part, la subornation de témoin n’est pas reprise dans la loi électorale».
D’autre part, le sénateur et membre du MLC Jacques Djoli accuse la Céni d’avoir «caché de manière malveillante» le fait que «Jean-Pierre Bemba est condamné au premier degré», alors que la loi exige un jugement irrévocable. Il ajoute aussi que «la loi électorale cite limitativement les incriminations pour lesquelles on peut être exclu du processus» et que la subornation de témoins ne fait pas partie de cette liste.[24]

La candidature de l’ancien Premier ministre Samy Badibanga a été invalidée, car il n’aurait pas recouvré sa nationalité légalement, après l’avoir perdue en optant précédemment pour une autre.
Une question qui avait pourtant été soulevée fin 2016, lors de sa nomination comme premier ministre. A l’époque, le gouvernement avait assuré que le problème avait été réglé.
La Céni parle de défaut de nationalité d’origine pour expliquer sa décision. Selon elle, après avoir perdu sa nationalité d’origine, le recouvrement de cette dernière ne donne droit qu’à une nationalité d’acquisition et ne lui permet donc pas d’être candidat.
Une décision que Samy Badibanga ne comprend pas. «Je bénéficie d’un arrêté ministériel portant recouvrement de la nationalité congolaise d’origine, justement c’est bien spécifié, qui a été signé le 25 novembre 2016 par le ministre actuel de la Justice. Donc, en prenant une telle décision, la Céni se substitue au ministère de la Justice. D’autre part, comment se définit la nationalité congolaise d’origine? J’ai les deux parents qui sont congolais et je fais partie de cette ethnie du centre du Congo. Donc, je remplis tout à fait les deux conditions. Comment peut-on me faire perdre ma qualité de Congolais d’origine?».
Toutefois, selon plusieurs juristes, pour recouvrer la nationalité congolaise, il faut d’abord renoncer à celle que l’on détient par ailleurs. Pour sa part, maître Ricard Bondi Tshimbombo a affirmé que les arrêtés pris depuis 2015 par le ministre de la Justice, rétablissant certains politiciens dans leur nationalité congolaise, sont sans valeur, car les bénéficiaires de ces arrêtés n’ont jamais saisi les administrations des pays dont ils détiennent la nationalité acquise. Selon lui, «le bénéficiaire de la nationalité congolaise, des suites de cet arrêté ou de tous ces arrêtés, n’a pas versé la preuve de sa renonciation, parce que dans les registres de l’Etat civil de tous ces pays étrangers, on n’a pas pris acte que tel monsieur a renoncé à la nationalité».[25]

Le 25 août, dans une conférence de presse à Kinshasa, l’ancien Premier ministre Adolphe Muzito, dont la candidature à la présidentielle a été invalidée par la CENI, a accusé celle-ci d’avoir obéi à un ordre politique pour écarter les candidatures «sérieuses». Pour le prouver, il a déclaré qu’il n’était plus militant du Parti Lumumbiste Unifié (PALU): «J’ai été suspendu à durée indéterminée du Palu alors que je n’avais plus de fonction. Prenant congé du parti, j’ai écrit à ma cellule pour annoncer mon retrait du parti. Je ne suis plus militant du Palu. Tout a été versé dans mon dossier». Il a ajouté que «la CENI dit que je serais en conflit d’intérêt avec le PALU. En réalité, je suis candidat investi par l’Urep, tandis que M. Gizenga est investi par le Palu et alliés. Dire que je serais en conflit d’intérêt avec le candidat du Palu c’est un paradoxe. L’on peut bien comprendre que la CENI a mal travaillé et qu’elle s’est trompée». En rejetant tout conflit d’intérêt avec son ancien parti, Adolphe Muzito a annoncé qu’il va saisir la Cour constitutionnelle pour défendre ses droits.
Son porte-parole, Steve Kivuata, a affirmé que l’irrecevabilité de la candidature du Premier ministre honoraire prouve que la CENI est «inféodée au Front commun pour le Congo (FCC) et n’a fait que la volonté de cette plateforme de la majorité au pouvoir. Selon lui, Adolphe Muzito avait déjà démissionné du Parti Lumumbiste unifié (PALU) avant de déposer sa candidature au Bureau de réception et de traitement des candidatures: «Dans le dossier du candidat Muzito, il n’y a nulle part où l’on cite le PALU. Il a été investi par le groupement politique Nouvel élan. Il ne pourrait y avoir un conflit d’intérêt avec le PALU. En plus, il s’est désengagé du PALU en démissionnant de la manière la plus officielle. Et ses lettres de démission étaient contenues dans le dossier». Enfin, il a déclaré qu’il va utiliser tous les moyens de droit, mais aussi tous les moyens politiques possibles, pour défendre les droits de son candidat.[26]

En réaction à la publication de la liste provisoire des candidats pour la présidentielle et les législatives nationales, le porte-parole du Comité Laïc de Coordination (CLC), Jonas Tshiombela, a déclaré que «le Rejet des candidatures de Jean-Paul Bemba, Adolphe Muzito et consorts est la confirmation et la preuve que le Président sortant et sa CENI sont désormais des obstacles majeurs à l’organisation des élections crédibles et inclusives. Le CLC exige leur isolement du processus d’organisation des élections. Le CLC appelle à la mobilisation générale pour sauver le pays et la démocratie».[27]

[1] Cf RFI, 14.08.’18
[2] Cf Radio Okapi, 13.08.’18
[3] Cf Patrick Maki – Actualité.cd, 06.08.’18
[4] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 10.08.’18; Radio Okapi, 13.08.’18
[5] Cf Actualité.cd, 23.08.’18
[6] Cf Actualité.cd, 24.08.’18
[7] Cf RFI, 11.08.’18; Politico.cd, 14.08.’18
[8] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 10.08.’18
[9] Cf RFI, 14.08.’18
[10] Cf Radio Okapi, 13.08.’18
[11] Cf Alphonse Muderwa – 7sur7.cd, 18.08.’18
[12] Cf Stanys Bujakera Tshiamala – Actualité.cd, 16,08.’18
[13] Cf Radio Okapi, 16.08.’18; RFI,17.08.’18
[14] Cf Radio Okapi, 16.08.’18
[15] Cf RFI,17.08.’18; Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 20.08.’18
[16] Cf Olivier Liffran et Quentin Noirfalisse – Jeune Afrique, 27.08.’18; RFI, 29.08.’18
[17] Cf https://afrique.lalibre.be/23507/clc-le-sang-des-congolais-doit-il-encore-couler/
[18] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 16.08.’18
[19] Cf Radio Okapi, 21.08.’18
[20] Cf RFI, 25.08.’18
[21] Cf Radio Okapi, 25.08.’18; Actualité.cd, 25.08.’18
[22] Cf Radio Okapi, 25.08.’18
[23] Cf Actualité.cd, 26.08.’18
[24] Cf RFI, 25.08.’18
[25] Cf RFI, 23.08.’18; RFI, 25.08.’18
[26] Cf Stany Bujakera Tshiamala – Actualité.cd, 25.08.’18 ; Radio Okapi, 25.08.’18
[27] Cf Actualité.cd, 26.08.’18