Congo Actualité n. 329

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: VERS UN DEUXIÈME « GLISSEMENT » DES ÉLECTIONS?

  1. VERS UN DEUXIÈME « GLISSEMENT » DES ÉLECTIONS?
    1. L’annonce du président de la Commission électorale
    2. Les réactions de l’Oppositio
    3. Les réactions de la Majorité Présidentielle et Alliés
    4. Les réactions de la Société Civile
    5. L’hypothèse d’une transition: sans Kabila / avec Kabila
    6. Une deuxième hypothèse: une tenue séparée des scrutins prévus couplés
  2. À PROPOS DU RAPATRIEMENT ET DE L’ENTERREMENT DE LA DÉPOUILLE D’ETIENNE TSHISEKEDI

 

ÉDITORIAL: VERS UN DEUXIÈME « GLISSEMENT » DES ÉLECTIONS?

 

 

 

 

1. VERS UN DEUXIÈME « GLISSEMENT » DES ÉLECTIONS?

 

a. L’annonce du président de la Commission électorale

 

Le 7 juillet, le président de la Commission électorale, Corneille Nangaa, a annoncé que les paramètres actuels ne permettent pas l’organisation des élections en décembre 2017. Parmi les barrières évoquées, il y a évoqué l’insuffisance de certaines lois que le Parlement devrait modifier et harmoniser, pour permettre à la Commission électorale di poursuivre son travail de préparation des élections.

Il y a d’abord la loi électorale. Les articles 115, 145, 146, 198 et 208 de cette loi lient la répartition des sièges au sein du Parlement à la densité de la population, c’est-à-dire implicitement aux résultats d’un recensement récent de la population qui n’a pas encore eu lieu ou aux données d’un registre d’état civil qui n’existe absolument pas. C’est pour cela que, en l’absence d’un recensement rénové de la population, la CENI propose d’inscrire, dans la loi, non le nombre des habitants, mais le nombre d’électeurs par circonscription, comme base de calcul pour la répartition des sièges.

D’autres aspects concernent:

La limitation des candidatures de tout membre ayant démissionné d’un parti ou groupement politique;

La fixation des règles applicables aux candidatures multiples dans une même circonscription;

L’encadrement des manifestations publiques durant la campagne électorale.

L’encadrement de temps d’antenne dans les médias publics par le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC);

La CENI avait également suggéré la réduction du nombre des partis politiques devant participer aux élections, c’est-à-dire que les partis devront se regrouper comme au Parlement. On s’inspirerait par exemple des 14 groupes parlementaires pour constituer des regroupements électoraux au lieu de tabler sur les 500 partis politiques. Cette stratégie devrait permettre, selon la CENI, de réduire la taille du bulletin et celle de l’urne. Elle devra permettre aussi de réduire le coût du déploiement sur l’ensemble du territoire.

Le bureau de la commission électorale dit qu’il attendait cet arsenal juridique au complet avant la fin de la session parlementaire du mois de mars 2017. Les députés sont allés en vacances. Aucune perspective d’une session extraordinaire n’a été évoquée. D’où l’argument de manque de volonté politique souligné par les opposants et la société civile.

Encore faut-il retenir que la Commission électorale estime un délai allant de 71 à 50 jours pour l’adoption et la promulgation de la loi sur la répartition des sièges. En outre, dans ses prévisions internes, elle prévoit la répartition des sièges par circonscription avant l’inscription des candidatures suivie de la commande des matériels «sensibles» (bulletins, urnes, etc.).[1]

 

Le 9 juillet, sur le plateau du Journal Afrique de TV5 Monde, le président de la CENI, Corneille Nangaa, a annoncé que le calendrier électoral sera publié après l’évaluation du processus électoral par son institution, le gouvernement et le Conseil National de Suivi de l’Accord du 31 décembre 2016 (CNSA). «L’accord prévoit que l’évaluation technique du processus électoral soit faite avec le gouvernement et le CNSA. Une fois cette évaluation faite, le calendrier électoral sera alors publié», a-t-il déclaré. Toutefois, le CNSA n’est pas encore opérationnel et la loi organique l’instituant n’a pas encore été votée.

Corneille Nangaa a ajouté que le pays n’ira pas aux élections sans les provinces du Kasaï. «Nous avons 33 millions d’électeurs déjà inscrits, c’est-à-dire le 80% de la population électorale. Il ne nous reste que les deux provinces du Kasaï et du Kasaï central et les territoires de Kamiji et Luilu dans le Lomami (…). Nous n’irons pas aux élections sans les Kasaï qui représentent environ 10% de l’électorat. Nous devons avoir la même équité. Nous avons déjà commencé les préparatifs des opérations dans cette zone» a-t-il déclaré.

Il a, enfin, demandé du temps pour bien organiser les élections: «Je suis le président de la CENI. Je suis le garant de la bonne organisation des élections. Nous sommes devant la possibilité de la toute première alternance pacifique. Il va falloir avoir le temps nécessaire pour bien organiser les élections».[2]

 

Dans une interview, Corneille Nangaa a réaffirmé que «un éventuel report des élections est dû, entre autres, aux activités préparatoires des élections, la plus importante d’entre elles étant l’inscription des Congolais sur les listes électorales». Selon lui, «la situation sécuritaire au Kasaï n’a pas permis d’y lancer cette opération d’enrôlement des électeurs au même moment que dans les autres provinces. Cette situation a perturbé les plans de la Commission électorale. L’opération d’enrôlement des électeurs dans cette partie du territoire national risque d’avoir un impact négatif sur les délais de la tenue des scrutins mais, au même temps, il n’est pas possible d’aller aux élections en laissant de côté les population du Kasaï».[3]

 

b. Les réactions de l’Opposition

 

Après l’annonce par le président de la Ceni de l’impossibilité de tenir les élections présidentielles, législatives nationales et législatives provinciales cette année, les mots se font de plus en plus menaçants du côté du Rassemblement de l’Opposition. Sur son compte twitter, le député Martin Fayulu a relevé que, «en décidant unilatéralement de renvoyer les élections aux calendres grecques, M. Nangaa joue avec le feu». L’UDA de Claudel Lubaya a demandé les démissions du président de la Ceni et du chef de l’État, accusés d’être responsables de cet échec. Selon le président du Rassemblement, Félix Tshiskedi, «par sa déclaration prouvant son appartenance à la Kabilie, Corneille Nangaa a déclaré la guerre au Peuple Congolais». Globalement, l’opposition congolaise rejette l’idée d’un report des élections et appelle plutôt à la mobilisation pour exiger « le départ » de Joseph Kabila. Sur son compte twitter, Sindika Dokolo a suggéré la mise en place d’une «transition rapide sans les Kabilistes, qui seront remplacés par la société civile». Une proposition faite également par l’UDA qui évoque un mécanisme intérimaire de 90 à 120 jours pour aller rapidement aux élections.

Du côté du Pouvoir, pas de réaction. Pour l’instant, ce bref silence fonctionne. En effet, depuis 24 heures, l’homme à abattre n’est plus le président Kabila, mais Corneille Nangaa, car il n’a pas attendu la concertation entre son institution, le futur CNSA et le gouvernement, comme le prévoit l’accord de la Saint Sylvestre, pour faire une annonce si sensible.[4]

 

Le 10 juillet, l’Alternance pour la République (AR), membre du Rassemblement de l’Opposition, a relevé le caractère « unilatéral » de la déclaration du président de la CENI Corneille Nangaa faite, depuis Paris, sur «l’impossibilité d’organiser les élections avant la fin de l’année 2017».

Delly Sesanga, le président de cette plateforme ne comprend pas que la CENI annonce seule le report de la tenue d’élections, alors que le processus électoral est inclusif.

«Cette déclaration unilatérale du président de la CENI n’engage que lui. Sans avoir donné le bilan de la situation de la CENI au cours de la dernière session parlementaire, nous ne comprenons pas cette sortie du président de la CENI qui ressemble à une remise en cause des acquis de l’accord et une violation de celui-ci par rapport à l’attente de la population», a déclaré M. Sessanga.

Le président de l’AR estime que la déclaration du président de la CENI est un aveu d’échec et d’incompétence des dirigeants de cette institution à accomplir leurs missions. Il leur conseille dès lors de démissionner. «Dans pareilles circonstances, on peut demander à la CENI de rendre le tablier, pour qu’une équipe beaucoup plus efficace puisse travailler et permettre d’atteindre l’objectif qui est celui de l’organisation des élections en décembre de cette année», a-t-il conclu.[5]

 

Le 10 juillet, dans une déclaration, le député national et président du Mouvement de Solidarité pour le Changement, Laurent Batumona a accusé Joseph Kabila et son régime d’être à l’origine de la crise actuelle et du blocage du processus électoral.

Une déclaration qui fait suite à l’annonce du report des élections par le président de la CENI.

«Le président de la république est à l’origine du blocage du processus électoral et de la crise politique actuelle car, avec sa majorité, il ne respecte pas la constitution, ni la parole donnée», a dit Laurent Batumona, qui accuse le pouvoir d’instaurer une dictature pour se maintenir contre l’ordre constitutionnel: «Il va sans dire que le régime actuel ne respecte pas la Constitution qui l’oblige à organiser les élections à la fin de chaque mandat … C’est pourquoi je m’insurge contre toute tentative d’organiser un référendum ou de procéder à la révision de la Constitution. La CENI doit respecter le peuple congolais qui veut les élections conformément à l’accord du 31 décembre (…) Kabila et sa majorité veulent instaurer une dictature dans le pays, nous ne l’accepterons pas».[6]

 

Le 10 juillet, le Groupe des 7 (G7) a condamné l’annonce fait par Corneille Nangaa, le Président de la CENI, sur un éventuel report des élections. S’appuyant sur le dernier rapport de l’Organisation Internationale de la Francophonie, ce regroupement politique de l’Opposition soutient qu’il est toujours possible d’organiser les élections d’ici au 31 décembre. Le G7 considère que la direction actuelle de la CENI a échoué et exige de ce fait sa redynamisation, comme prévu dans l’Accord du 31 décembre. «Par sa déclaration outrageante, faite par-dessus tout à l’étranger, Monsieur Nangaa vient une fois de plus de confirmer qu’il est au service de Monsieur Kabila et de sa mouvance, dont il exécute servilement les instructions et les stratégies», dit la plateforme de soutien à Moise Katumbi. Pour le G7, aucun dispositif constitutionnel et/ou légal ne donne au Président de la CENI le pouvoir de décider du renvoi des élections. C’est pour cela qu’il continue à exiger de la CENI «la publication du calendrier électoral, tenant compte de la date butoir du 31 décembre 2017 tel que convenu dans l’Accord de la Saint Sylvestre».[7]

 

Le 10 juillet, le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement a affirmé qu’il considère l’annonce faite par le président de la CENI comme une «véritable déclaration de guerre au peuple congolais». Au cours d’un point de presse, le Rassemblement a indiqué que «le président de la Commission électorale sera responsable et répondra devant le peuple congolais de tout décalage dans l’organisation des élections» qui, en principe, sont censées se tenir cette année, conformément aux dispositions de l’accord de la Saint-Sylvestre.

«L’annonce faite par Corneille Nangaa est une véritable déclaration de guerre au peuple congolais, ordonnée par Joseph Kabila, pour énerver un peuple déjà meurtri par la situation socio-économique catastrophique et qui, pour cela, entend le voir libérer, le 31 décembre 2017 au plus tard, le fauteuil et le palais présidentiels qu’il occupe à la faveur d’un coup de force», indique le communiqué signé par Félix Antoine Tshisekedi.

Le Rassemblement qualifie la sortie médiatique de Nangaa d’une “fuite en avant” et évoque également des foyers d’insécurité qui se multiplient au pays, afin de justifier la non-tenue des élections. «Joseph Kabila qui est prêt à tout continue à multiplier des subterfuges et n’hésite pas à utiliser des moyens qui heurtent violemment la conscience humaine, comme la multiplication des foyers d’insécurité, notamment dans le Kasaï et à l’Est du pays où sous ses ordres, des éléments des forces armées et de la police se livrent à des tueries de masses et autres crimes ignobles dont sont victimes plusieurs milliers de civils parmi lesquels les experts des Nations Unies», ajoute le Rassemblement qui appelle également le peuple congolais à «redoubler de vigilance et à se tenir prêt, pour prendre activement part aux grandes actions de résistance qu’il va proposer à la Nation le 22 juillet prochain, lors de la clôture des travaux de son deuxième conclave».[8]

 

Le 12 juillet, la secrétaire générale Mouvement de libération du Congo (MLC), Eve Bazaïba Masudi, s’est insurgée contre le président de la Commission électorale qui a annoncé l’impossibilité de l’organisation des élections en RDC avant fin 2017, conformément au prescrit de l’Accord du 31 décembre 2016: «Il ne faut pas que Monsieur Nangaa joue avec le feu. S’il veut jouer aussi le jeu de pérenniser l’illégitimité des institutions et de leurs animateurs, je crois qu’il va en endosser la responsabilité». La secrétaire générale du MLC a ajouté que «il n’y a aucun prétexte qui peut faire en sorte que nous n’ayons pas d’élections. L’insécurité ne peut pas être un prétexte en ce qui concerne l’organisation des élections, surtout qu’au Kasaï, ce n’est pas un problème de groupes armés étrangers mais c’est plutôt une chefferie qui s’est insurgée contre l’autorité politico-administrative établie». Elle a par ailleurs soutenu que le gouvernement devra trouver des solutions à la crise qui sévit aux Kasaï suite aux affrontements entre les forces de l’ordre et les miliciens Kamuina Nsapu.[9]

 

c. Les réactions de la Majorité Présidentielle et Alliés

 

Le 9 juillet, le président national de Nouveaux Républicains pour la Justice, Joseph Bangakya, a affirmé que la non-tenue des élections cette année ne constitue pas une surprise. Dans une interview, l’ancien vice-gouverneur de l’ex-Province Orientale a expliqué que l’accord de la Saint-Sylvestre avait laissé une possibilité de report du délai prévu. «Lors des discussions du centre interdiocésain, il était prévu qu’en cas de la non-tenue des élections, que la Ceni, le CNSA et le gouvernement se réunissent pour fixer une date fixe et un calendrier clair qui doivent être respectés d’une part, et d’autre part la Ceni a toujours dit que tenir 3 scrutins le même jour en 2017 était difficile», a-t-il dit. Ce qui appelle, selon Bangakya, l’installation rapide du CNSA en vue de discuter de la date prochaine de la tenue des élections. «Cette réunion permettra d’avoir une date raisonnable et non populiste qui devra être respectée», dit-il avant d’ajouter que «l’opposition savait la probabilité du report de l’organisation des élections».[10]

 

Le 10 juillet, le porte-parole de la Majorité présidentielle (MP), André Alain-Atundu, a déclaré qu’il trouve «censée» la déclaration de Corneille Nangaa qui, à Paris, a affirmé qu’il n’était pas possible d’organiser les élections d’ici 2017. Le porte-parole de la MP a estimé que cette déclaration était «fondée, parce qu’elle tient compte des paramètres sécuritaires de la RDC».

«Il serait hasardeux d’affirmer que les élections se tiendraient à la date convenue dans l’accord, d’autant plus qu’il y a deux provinces dans lesquelles on n’a pas encore commencé l’opération d’enrôlement des électeurs et qui ne peuvent pas être exclues du processus», a fait observer le cadre de la MP. Il a appelé les acteurs politiques à se «conformer aux déclarations fondées d’un technicien, plutôt que de s’en remettre aux aspirations politiques».[11]

 

Le 11 juillet, le ministre de la Communication et des Médias, Lambert Mende, a déclaré, dans une interview, que le gouvernement a pris acte de la position du président de la Commission électorale sur la probabilité de renvoyer les élections au-delà du 31 décembre 2017, bien qu’il n’en ait pas encore été officiellement informé. En outre, il a précisé que l’accord du 31 décembre 2016 prévoit que, en cas de difficultés, la Commission électorale, le Gouvernement et le CNSA peuvent unanimement décider de ce qu’il convient de faire pour les résoudre.[12]

 

Le 16 juillet, faisant allusion aux déclarations du président de la Commission électorale sur l’impossibilité d’avoir des élections en 2017, l’initiateur du Parti travailliste, Steve Mbikayi, a déclaré que «Corneille Naanga a bien fait d’anticiper cette information, pour éviter qu’il y ait encore des tensions comme celles qu’on a connues en septembre de l’année passée».

Steve Mbikayi a affirmé que la décision d’organiser les élections avant la fin de cette année avait été «imposée» par le Rassemblement de l’Opposition, lors des discussions qui s’étaient déroulées entre le pouvoir et l’opposition, sous l’égide des évêques catholiques, en décembre dernier. «Au cours de ces discussions, nous étions tous sûrs que ce n’était pas possible d’avoir les élections en 2017. Et nous avions imposé cette date à la CENI, même si elle n’était pas d’accord», a fait savoir le président du Parti travailliste. Pour lui, avoir des élections cette année «est une utopie». «Ce qu’a dit M. Naanga, c’est ce que tous nous connaissions, tous [les] négociateurs. Mais on ne voulait pas le dire».[13]

 

d. Les réactions de la Société Civile

 

Le vice-président de la CENCO, Mgr Fridolin Ambongo, a dit ne pas comprendre comment le président de la CENI s’est livré à l’annonce de la non-tenue des élections en 2017 sans se concerter au préalable avec tous les organes compétents au regard de l’accord du 31 décembre 2016. Pour le prélat, «la Commission électorale aurait dû, avant d’annoncer un quelconque report, faire le point sur le processus d’enrôlement des électeurs et éclairer l’opinion sur l’étape suivante». Il a ensuite précisé que «le président de la Commission électorale aurait dû en parler d’abord  avec tous les responsables concernés tels que le CNSA et le gouvernement, comme prévu dans l’Accord du 31 décembre 2016».

Mgr Ambongo a rappelé que, «dans leur déclaration, les Évêques de la CENCO avaient dit que les élections doivent se tenir cette année, en 2017. Et jusque-là, personne n’a donné d’autres éléments contraires pour affirmer que ce n’est pas possible d’organiser les élections. Tout ce que l’on constate jusque-là, c’est l’accumulation de mauvaises volontés pour ne pas organiser les élections». Selon l’évêque, c’est cette mauvaise volonté qui est à l’origine des frustrations au sein du peuple congolais. Selon lui, «il n’y a personne qui souhaite l’embrasement du pays. Mais, dans un système démocratique, quand il y a des frustrations le peuple a le droit d’exprimer sa mauvaise humeur. Et dans tous les pays qui se respectent dans le monde, le seul moyen pour le peuple de s’exprimer c’est des manifestations pacifiques».[14]

 

Le 10 juillet, Dans un communiqué, la Coalition de 33 ONG s’est dite indignée de la déclaration du président de la CENI Corneille Nangaa annonçant le report à une date ultérieure des élections censées se tenir cette année, conformément à l’accord du 31 décembre. La Coalition de 33 ONG a recommandé au représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies et Chef de la MONUSCO, Maman Sidikou, de «informer le Conseil de Sécurité des Nations Unies de cette situation savamment créée et entretenue par Corneille Nangaa, afin que des sanctions individuelles et ciblées lui soient appliquées au cas où il ne reviendrait pas à la raison». La Coalition de 33 ONG insiste également sur la sortie imminente du calendrier global et inclusif des activités électorales.[15]

 

Le 11 juillet, dans un communiqué, le mouvement citoyen « Compte à rebours » a condamné ce qu’il qualifie de «énième confirmation des manœuvres dilatoires orchestrées par le président de la CENI en parfaite intelligence avec le régime en place, pour asphyxier le processus électoral».

Selon Compte à rebours, «cette structure voulue indépendante par le constituant et le législateur s’est transformée en un appendice de la Majorité présidentielle (MP), mieux en son bras d’exécution». Ce mouvement d’éveil civique voit d’un très mauvais œil la multiplication des foyers de tensions devenus aujourd’hui, pour la CENI, des prétextes pour continuer à renvoyer les élections. Compte à rebours annonce l’intensification de ses actions sur le terrain pour obtenir la publication d’un calendrier électoral global d’ici la fin de ce mois de juillet, mais également le départ de Corneille Nangaa à la tête de la CENI pour s’assurer de la transparence du processus électoral.[16]

 

d. L’hypothèse d’une transition: sans Kabila / avec Kabila

 

Le 11 juillet, au siège de l’UDPS, Félix Tshisekedi a dit souhaiter une courte transition sans Kabila à la tête du pays si les élections ne se tenaient pas au 31 décembre 2017: «S’il n’y a pas d’élections avant le 31 décembre, il faudra une courte transition sans Kabila. Exactement, comme cela était le cas au Burkina-Faso. Au 31 décembre, la classe politique va se réunir pour désigner celui qui n’aura que comme tâche de nous conduire aux élections».

Il a une fois de plus dénoncé le report des élections et s’est attaqué une nouvelle fois à Corneille Nangaa. «Il faut être vigilant. Il y a un complot. C’est pour cela que nous attaquons Corneille Nangaa. Il a accepté de travailler avec les ennemis du Congo», a-t-il dit.

Face aux militants de son parti, Félix Tshisekedi a évoqué les trois stratégies, qui selon lui, utilisent Kabila pour se maintenir au pouvoir: «Kabila est à la base de notre souffrance. Il bénéficie de la complicité de certains d’entre nous. Il use de trois stratégies: le référendum, le chaos et la stratégie à la Poutin. Au sujet du référendum, il semble essoufflé. Sa deuxième stratégie, c’est la politique de la terre brûlée. D’après nos informations, après les Kasaï ce sera le Kongo central. Ils ne veulent pas qu’il y ait élection».[17]

 

Le 14 juillet, au cours d’une conférence de presse, “Liberté”, parti politique nouvellement créé par le député national Germain Kambinga, a proposé la reprise des discussions sous la Cenco, afin de sortir la RDC de la crise politique. Cette formation politique suggère également que le poste de porte-parole de l’opposition soit attribué à l’UDPS et celui de président du CNSA à Vital Kamerhe.

Selon Liberté, «dans le contexte de conflit permanent où la majorité présidentielle et l’opposition se rejettent la responsabilité de la crise sociopolitique, les sociétaires de Liberté proposent, sur le plan politique, la reprise des négociations sous l’égide de la Cenco, avec un format élargi et pour une durée de 30 jours maximum (…). Ils proposent aussi la mise en place, conformément à la loi sur le statut de  l’opposition et au plus tard le 20 septembre 2017, d’une structure de l’opposition toute entière, avec pour porte-parole de droit un délégué de l’UDPS et ce, au regard de la photographie électorale de 2011. La structure ainsi créée sera la seule habilitée à parler au nom de toute l’opposition y compris le G7. Liberté propose aussi une transition de 18 mois dirigée par l’actuel chef de l’État comme président de la république et par le porte-parole de l’opposition comme premier ministre. Cette période de transition serait susceptible de prorogation de 3 mois au maximum en cas de force majeure».

En outre, ce parti sollicite la fin des poursuites contre Moïse Katumbi et son retour au pays dans le cadre des mesures de décrispation. Pour le député national Germain Kambinga, ancien ministre de l’industrie, l’opposition devrait rejeter toute option d’une “insurrection armée” au risque de mettre en péril la Constitution. A la majorité présidentielle, Kambinga exhorte la prise en compte des revendications sociales de la population.[18]

 

f. Une deuxième hypothèse: une tenue séparée des scrutins prévus couplés

 

Le 16 juillet, dans une interview, le président de Alternance pour la République (AR), Delly Sesanga, a affirmé que «personne ne veut dépasser le 31 décembre 2017 sans que les élections n’aient lieu». Selon lui, si la Commission électorale et le Gouvernement le veulent, «les élections peuvent encore avoir lieu au mois de décembre 2017, du moins en ce qui concerne la présidentielle et les législatives nationales … Dans cette perspective, on pourrait envisager les législatives provinciales en mars ou avril de l’année prochaine».

À propos de la participation du Rassemblement de l’Opposition au Gouvernement et au CNSA, Delly Sesanga a affirmé qu’il s’agit de discussions qui appartiennent déjà au passé. Selon lui, remettre sur la table les sujets du CNSA, du gouvernement et de l’arrangement particulier, ce serait participer à l’allongement des délais et donc faire le jeu et de la majorité et de la CENI.

Il a souligné aussi que les points de l’Accord sur lesquels le Rassemblement de l’Opposition ne transigera pas sont la tenue des élections présidentielles cette année et l’application des mesures de décrispation politique.[19]

 

Le 17 juillet, le vice-président du Groupe des 7 (G7), Christophe Lutundula, a affirmé que la solution à la question du report de élections se trouve au point 4.2 de l’accord du 31 décembre 2016: «La close 4.2 de l’accord n’est qu’un mécanisme d’ajustement de la séquence électorale à trois scrutins à la fois, que nous avons prévu en cas de force majeure avérée. Ce mécanisme permettrait une tenue séparée des scrutins couplés. Cette close n’est donc pas permissive de renvoi ou du report sine die des dits scrutins».[20]

 

 

2. À PROPOS DU RAPATRIEMENT ET DE L’ENTERREMENT DE LA DÉPOUILLE D’ETIENNE TSHISEKEDI

 

Le 7 juin, le porte- parole de l’UDPS, Augustin Kabuya, a affirmé que l’UDPS et le Gouvernement ont repris des négociations pour organiser le rapatriement de la dépouille d’Etienne Tshisekedi décédé le 1er février à Bruxelles et que une commission mixte gouvernement-famille a été mise en place pour examiner cette question. Il a aussi révélé que ces obsèques seront prises en charge par le Gouvernement congolais.[21]

 

Le 8 juin, le frère d’Étienne Tshisekedi, Mgr Gérard Mulumba, a déclaré que le gouvernement congolais, l’UDPS ainsi que la famille biologique d’Étienne Tshisekedi sont enfin parvenus à un accord notamment sur le lieu de son enterrement: «Nous nous sommes mis d’accord. Le président Tshisekedi sera enterré dans la périphérie de la ville de Kinshasa à N’sele dans une concession familiale». Un cadre de l’UDPS a confirmé la nouvelle et a annoncé que l’exposition de la dépouille aura lieu au Palais du peuple, précisant toutefois que «rien n’est encore définitif».[22]

 

Le 15 juin, dans une interview, le secrétaire générale de l’UDPS, Jean-Marc Kabund, a accusé le pouvoir de n’avoir aucune volonté d’organiser les obsèques du président de l’UDPS, bien que cela ait déjà fait l’objet des discussions entre la famille biologique du disparu, l’UDPS et l’Etat. Il a affirmé que l’UDPS et la famille biologique du défunt ont déjà signé le communiqué final devant marquer la fin des discussions avec l’exécutif national au sujet de l’organisation des obsèques. Il a ajouté que l’UDPS et la famille ne comprennent pas pourquoi le ministre de l’Intérieur, Emmanuel Shadary, n’a pas encore signé ce communiqué.[23]

 

Le 29 juin, au cours d’une conférence de presse, l’UDPS a déclaré prendre acte du refus du gouvernement d’organiser les obsèques d’Étienne Tshisekedi, a promis de s’en charger elle-même et a annoncé pour bientôt le rapatriement de la dépouille d’Étienne Tshisekedi.

Selon le secrétaire général de l’UDPS, Jean-Marc Kabund, «l’UDPS et la famille biologique annoncent solennellement qu’elles prennent acte du désistement de l’Etat congolais dans l’organisation des dites obsèques. Par conséquent, elles décident de rapatrier, par leurs propres moyens, la dépouille mortelle du président à la date qui sera incessamment communiquée».

Jean-Marc Kabund insiste: «Que le gouvernement fasse ce qu’il a fait comme toujours, c’est à dire, envoyer les policiers et militaires nous accompagner à l’endroit de l’exposition. Qu’il considère l’arrivée du corps en quelque sorte comme si c’était une marche pacifique».[24]

 

[1] Cf Patient LIGODI – Actualité.cd, 11.07.’17

[2] Cf Actualité.cd, 09.07.’17

[3] Cf Le Point Afrique – La Prospérité – via 7sur7.cd, 13.07.’17

[4] Cf Yvon Muya – Cas-info.ca, 08.07.’17

[5] Cf Radio Okapi, 10.07.’17

[6] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 10.07.’17

[7] Cf Actualité.cd, 10.07.’17

[8] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 10.07.’17

[9] Cf Radio Okapi, 12.07.’17

[10] Cf Rachel Kitsita – Actualité.cd, 10.07.’17

[11] Cf Radio Okapi, 10.07.’17

[12] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 11.07.’17

[13] Cf Radio Okapi, 17.07.’17

[14] Cf Rachel Kitsita – Actualité.cd, 10.07.’17

[15] Cf Will Cleas Nlemvo – Actualité.cd, 10.07.’17

[16] Cf Élysée Odia – 7sur7.cd, 11.07.’17

[17] Cf Actualité.cd, 11.07.’17

[18] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 13.07.’17; Radio Okapi, 15.07.’17; Jeff Kaleb Hobiang – 7sur7.cd, 15.07.’17

[19] Cf Israël Mutala – 7sur7.cd, 17.07.’17

[20] Cf Cas-info.ca, 17.07.’17

[21] Cf Radio Okapi, 07.06.’17

[22] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 08.06.’17

[23] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 15.06.’17

[24] Cf Actualité.cd, 29.06.’17; RFI, 30.06.’17