Congo Actualité n. 281

SOMMAIRE:

ÉDITORIAL: POUR LA LIBERTÉ DE MANIFESTATION

  1. RÉPRESSION DE MANIFESTATIONS ET ARRESTATIONS
    1. Le cas de Martin Fayulu
    2. Le cas de Bienvenu Matumo, Héritier Kapitene et Victor Tesongo
    3. La marche du 26 mai
  2. LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE CONDAMNE TOUTE RÉPRESSION

ÉDITORIAL: POUR LA LIBERTÉ DE MANIFESTATION

1. RÉPRESSION DE MANIFESTATIONS ET ARRESTATIONS

a. Le cas de Martin Fayulu

Le 14 mai, le député national Martin Fayulu a été arrêté en début d’après-midi, par les services de sécurité à Bandundu, chef-lieu de la province du Kwilu. Une information démentie par la maire de la ville. Selon le président du parti de l’opposition Forces novatrices pour l’unité et la solidarité (FONUS), Joseph Olenghankoy Mukundji, Martin Fayulu a été appréhendé pendant qu’il venait d’entrer dans la ville par véhicule via Kikwit, accompagné de nombreux de ses sympathisants.

La maire de Bandundu-ville, Zozo Lola Masikini, dément ces affirmations. Elle précise que Martin Fayulu n’est pas aux arrêts: «Monsieur Fayulu est un député national, il est venu à Bandundu, c’est chez lui. Il a été escorté par sa base jusqu’à leur siège. Il n’a pas été inquiété. Moi personnellement, accompagnée de mon adjoint ainsi que du comité de sécurité, on l’a ramené jusqu’à l’hôtel où il devait passer la nuit». Elle a cependant affirmé avoir interdit à Martin Fayulu de tenir directement un meeting sans avoir au préalable l’autorisation des autorités urbaines.

De son côté, le député Martin Fayulu affirme qu’il a été empêché de «se mouvoir» pendant environ trois heures et qu’il considère cette restriction de ses mouvements comme une arrestation.

Cet incident survient trois mois après que le parti de Martin Fayulu Madidi, Engagement pour la citoyenneté et le développement (ECIDE) avait accusé la police d’avoir dispersé une centaine de ses militants partis accueillir son président à l’aéroport de Bandundu-ville.[1]

Le 19 mai, à Kinshasa, l’Hôtel Faden House appartenant au député de l’opposition Martin Fayulu a été scellé par la Direction générale de recettes de Kinshasa (DGRK). Selon le secrétaire général du parti de M. Fayulu, Devos Kitoko Mulenda, l’établissement a été fermé pour non-paiement de taxes. Le secrétaire général de l’Ecidé affirme pourtant que le chef de son parti est en règle avec le fisc. Devos Kitoko Mulenda évoque cependant «un problème technique» lié à la superficie de la parcelle où se trouve l’hôtel du chef de son parti: «La parcelle où l’hôtel de Martin Fayulu se trouve est une grande parcelle. Il y a une partie que l’hôtel occupe (deux bâtiments) et une autre partie qui est vide. Les agents de la DGRK avaient prétendu à son temps que la parcelle est grande et l’ont subdivisée en deux parties, alors que toute la parcelle a un seul certificat d’enregistrement. Et Martin Fayulu dit : ‘’Moi je paie l’impôt pour le seul document administratif que je détiens’’ ».

Selon Devos Kitoko, la menace de redressement fiscal date de 2010 et Martin Fayulu était allé en justice pour contester. Le dossier n’avait pas été tranché et depuis, aucune nouvelle. Pour le secrétaire général de l’Ecidé, l’affaire est plutôt politique. Selon lui, «il s’agit d’un acharnement et d’intimidations politiques qui visent à fermer la bouche à tous ceux qui ont un son de cloche contraire à celui du pouvoir».[2]

Le 25 mai, le député national, Martin Fayulu, a annoncé avoir introduit une plainte contre la Direction générale des recettes de Kinshasa (DGRK) au Tribunal de grande instance de Kinshasa-Gombe. Il accuse la DGRK d’avoir scellé son hôtel Faden House de façon illégale. Martin Fayulu a estimé que son hôtel n’est redevable ni de l’Impôt sur revenu locatif (IRL), moins encore des amendes ou pénalités. «Les agents de la DGRK sont passés ici pour dire que j’ai payé l’impôt foncier pour une parcelle et pas pour une autre. Nous avons démontré que nous n’avons pas deux parcelles mais plutôt une. Et, nous avons montré le certificat d’enregistrement avec les mesurages», a-t-il expliqué.[3]

b. Le cas de Bienvenu Matumo, Héritier Kapitene et Victor Tesongo

Le 20 mai, à Kinshasa, Bienvenu Matumo et Héritier Kapitene du mouvement Lutte pour le changement (Lucha) ainsi que Victor Tesongo, jeune militant de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC, un parti de l’opposition), ont été condamnés à 12 mois de prison et à une amende de 100 000 francs congolais, ainsi qu’au payement de 300 dollars, en dommage et intérêts à la République démocratique du Congo. La défense promet d’interjeter appel. Bienvenu Matumo, Héritier Kapitene, et Victor Tesongo sont inculpés d’«incitation à la désobéissance civile, propagation de fausses nouvelles, et atteinte à la sûreté intérieure de l’État». Le verdict a été rendu à la prison de Makala, où ils sont détenus, en présence de Fred Bauma, membre de la Lucha, et d’Yves Makwambala, membre de Filimbi, arrêtés il y a plus d’un an et toujours en attente de jugement.

Les trois militants avaient été arrêtés en même temps que huit autres membres de Lucha dans la nuit du 15 au 16 février dernier, à la veille d’une journée ville morte organisée par la société civile congolaise et par l’opposition. Ils sortaient d’une réunion d’organisation de l’événement lorsqu’ils ont disparu. Leurs proches sont restés sans nouvelles d’eux jusqu’au 19 février, jour où ils ont été transférés dans les bureau de l’Agence nationale de renseignements (ANR). Le lendemain, ils étaient placés sous mandat d’arrêt provisoire. Human Rights Watch a plusieurs fois dénoncé leur détention, la qualifiant d’arbitraire.[4]

Le 21 mai, à Kinshasa, la Police nationale congolaise (PNC) a dispersé une marche pacifique organisée pour dénoncer les tueries de Beni et pour soutenir les populations meurtries du Nord-Kivu. Le Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l’homme (BCNUDH) parle d’au moins vingt-cinq personnes arrêtées, dont Albert Moleka de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS). Le président du DCU, Tshimanga Tshipanda Vidje, initiateur de cette manifestation, aurait aussi été interpellé. De son côté, le commissaire provincial de la PNC ville de Kinshasa, le général Célestin Kanyama, affirme ne pas être au courant de cette manifestation.

Il ajoute que, «s’il y a eu des arrestations, c’est que la manifestation n’a pas été autorisée par les autorités». Ce que démentent les organisateurs. Ils disent avoir informé tous les services de l’Etat, la Primature, la Présidence, les gouvernements national et provincial.

Le 22 mai, le porte-parole de la Police Nationale Congolaise (PNC), le colonel Mwanamputu, a annoncé que toutes les personnes arrêtées lors de la marche dispersée par la police ont été libérées. Cette libération est intervenue samedi même dans la soirée. La nouvelle a été confirmée par le président du DCU, Tshimanga Tshipanda Vidje, un des initiateurs de cette manifestation visant à dénoncer les tueries de Beni (Nord-Kivu).[5]

c. La marche du 26 mai

Plusieurs regroupements de l’opposition ont appelé à des manifestations pacifiques en RDC pour protester contre le dernier arrêt de la Cour constitutionnelle relatif à la fin du mandat du président de la République, réclamer l’organisation de l’élection présidentielle dans les délais constitutionnels et manifester la solidarité envers les habitants de Beni victimes des tueries répétées depuis deux ans.

Les manifestations ont été interdites partout, sauf à Kinshasa et à Bukavu.

Le 15 mai, le G7, la Dynamique de l’opposition, l’Alternance pour la République et le Front citoyen 2016 ont appelé à une marche de protestation, le 26 mai, sur toute l’étendue du territoire de la RDC, pour réclamer notamment la publication du calendrier électoral et la tenue des élections dans le délai constitutionnel.

Au sujet de l’organisation de la marche du 26 mai, le députe national Franck Diongo, membre de l’Alternance pour la République, indique que les organisateurs vont se contenter d’informer les autorités de sa tenue, sans en attendre une autorisation de la part des autorités.

Le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, fait savoir que l’organisation d’une marche doit être coordonnée avec les autorités.

Le porte-parole de la police, colonel Mwana Mputu, indique notamment que les organisateurs d’une marche doivent discuter notamment de l’itinéraire avec les autorités avant la tenue de la manifestation. Selon le colonel Mwana Mputu, «l’organisateur doit, en principe, écrire à l’autorité politico-administrative. Et l’autorité va le convoquer pour qu’ensemble, ils puissent étudier les différents itinéraires à prendre afin que l’autorité politico-administrative puisse donner des instructions formelles à la police d’encadrer les manifestants jusqu’au point de chute. Si les autorités et les organisateurs ne discutent pas préalablement de l’itinéraire, la police ne permettrait pas qu’on vienne perturber l’ordre public sur la chaussée».[6]

Le 23 mai, au moins sept opposants ont été arrêtés à Matadi dans la province du Bas Congo. Ils étaient réunis au domicile d’un membre de l’UNC de Vital Kamerhe pour préparer une manifestation prévue le 26 mai. Du côté des services de sécurité, on explique avoir été informé que des jeunes avaient été regroupés pour préparer des tracts incitant la population à la violence. Mais on assure également avoir donné des instructions pour que ces sept opposants soient transférés au parquet et soient libérés si les faits n’étaient pas avérés. L’opposition dénonce, elle, un nouvel acte d’intimidation et de répression de la part du régime.[7]

Le 24 mai, les opposants interpellés ont été amenés au parquet de Grande instance de Matadi pour y être entendus sur procès-verbal, après avoir passé la nuit dans les installations de l’Agence nationale des renseignements (ANR).[8]

Le 24 mai, à l’issue d’une rencontre avec la délégation de la Dynamique de l’opposition, le ministre provincial de l’Intérieur, Emmanuel Akweti, a annoncé que le gouverneur de Kinshasa ne s’est pas opposé à l’organisation de la manifestation du 26 mai. La Dynamique de l’opposition entend notamment dénoncer une nouvelle fois l’arrêt de la Cour constitutionnelle qui autorise le président Kabila à se maintenir au pouvoir au-delà de 2016 en cas de report de l’élection présidentielle. À Kinshasa, la marche de la Dynamique de l’opposition est donc confirmée. Il y a eu juste un changement de tracé.

Une délégation du parti présidentiel, le PPRD, était reçue dans la foulée par le gouverneur de la ville de Kinshasa. Ce parti aussi appelle à des manifestations à travers tout le pays entre le 25 et le 30 mai pour défendre la Cour constitutionnelle et son arrêt autorisant Joseph Kabila à rester au pouvoir jusqu’à l’élection d’un nouveau président, mais aussi pour défendre le dialogue convoqué par le chef de l’Etat congolais. Une grande marche du PPRD est prévue pour le jeudi 26 mai, comme pour l’opposition. Ce qui est un véritable casse-tête pour le gouvernement provincial.

Dans le reste du pays, en revanche, les marches de l’opposition sont interdites, comme à Lubumbashi et Mbuji Mayi, jugées sans bienfondé ou inopportunes par les autorités locales.

Le maire de Lubumbashi (Haut-Katanga), Jean Oscar Sanguza Mutunda, s’oppose à la marche projetée par l’opposition le 26 mai dans la ville. Selon lui, cette manifestation est inopportune, d’autant plus que l’arrêt de la Cour constitutionnelle est irrévocable et opposable à tous.

Le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, a interdit les manifestations dans toute la province. Selon lui, le G7, la Dynamique de l’opposition et le Front citoyen sont des structures non reconnues légalement et ne sont pas autorisées à organiser une quelconque manifestation dans sa province. En outre, ces manifestations sont sans fondement car, l’arrêt de la Cour constitutionnelle est inattaquable, a indiqué M. Paluku.[9]

Le 25 mai, pendant la soirée, le tracé de la marche de Kinshasa a été modifié à la suite d’une décision de dernière minute du gouvernement provincial. Pourtant, il avait fait l’objet de près de deux heures de discussions le jour précédent, le gouvernement ayant dans un premier temps validé le tracé de la marche de la Dynamique de l’opposition. Mais le problème était que le PPRD, le parti présidentiel, souhaitait lui aussi défiler sur le boulevard du 24 novembre, une artère symbolique de la capitale congolaise. Comme aucun des deux n’a voulu céder, explique-t-on du côté de l’Hôtel de Ville, le gouverneur de Kinshasa a donc décidé de ne le donner ni à l’un, ni à l’autre.

Enfin, la marche du PPRD et de la majorité présidentielle prévue le 26 mai a été reportée à une date ultérieure, pour éviter une confrontation avec les manifestants de l’opposition. Selon le secrétaire général adjoint du parti présidentiel, Emmanuel Shadari, c’est sur demande du gouverneur de la ville que cette marche du PPRD a été postposée à une date ultérieure.[10]

Le 26 mai, à Kinshasa, la marche a commencé aux environs de 11h30. Les policiers et les militaires étaient au bord des routes et laissaient passer les manifestants dans le calme. C’est au niveau de la Maison Schengen que la manifestation a été dispersée par la police.

Vital Kamerhe, président de l’Union pour la nation congolaise (UNC) et membre de la dynamique de l’opposition, a condamné la répression de la marche de l’opposition organisée à Kinshasa. Il a déploré le recours aux gaz lacrymogènes et les tirs à balles réelles. «On avait convenu avec le gouverneur dans son bureau de l’itinéraire et voilà que le soir il va nous écrire à 19h30’ pour nous dire qu’il venait de changer unilatéralement l’itinéraire et qu’il fallait prendre Huileries», a déploré Vital Kamerhe. Il a indiqué que c’est cette mesure qui a désorienté les manifestants et qui a poussé quelques manifestants à prendre l’avenue 24 novembre. «Nous avons fait en sorte que les gens qui participaient à la marche ne dérangent personne. On n’a pillé aucune boutique mais on a été surpris de voir que les officiers de la police ont lancé des gaz lacrymogènes et nous ont tiré des balles réelles et nous condamnons cela fermement», a décrié Vital Kamerhe qui a par ailleurs estimé que l’objectif de l’opposition a été atteint.

Pour sa part, le ministre provincial de l’Intérieur de la ville de Kinshasa, Emmanuel Akweti, indique que les opposants n’ont pas respecté l’itinéraire initialement prévu par les organisateurs et l’autorité urbaine. «Les forces de l’ordre ont utilisé les gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants à cause du non-respect du tracé. En effet, les forces de l’ordre se sont retrouvées devant deux groupes de manifestants. Le premier était composé par des manifestants qui n’ont pas respecté l’itinéraire tracé par l’autorité politico-administrative. Le deuxième était composé par ceux qui ont essayé de respecter le tracé défini par l’autorité. Comme ceux qui ont été dispersés dans le premier groupe se sont joints au deuxième groupe, la police était obligée de devoir utiliser les moyens classiques pour pouvoir les disperser», a expliqué M. Akweti.

Le général Célestin Kanyama, chef de la police de Kinshasa, a ajouté que, «malgré le non respect de l’itinéraire, la police a accompagné les manifestants jusqu’à la Maison Schengen, où ils devaient s’arrêter, mais ils ont essayé d’entrer à La Gombe [le centre-ville de Kinshasa] qui constitue une zone rouge. Nos éléments ont été alors contraints d’intervenir pour rétablir de l’ordre».

Malgré la répression, la Dynamique de l’opposition parle d’une véritable marée humaine, annonçant 200 000 manifestants à Kinshasa, mais la police pour sa part a estimé le cortège à 2000 participants.

Dans toutes les principales villes du Pays, la police a été déployée depuis très tôt le matin, pour empêcher ou disperser toute tentative de rassemblement. C’est le cas de Beni, Butembo, Bunia, Kisangani, Mbandaka, Kananga, Kalemie, Moba, Lubumbashi.

À Goma (Nord Kivu), des manifestants ont bravé l’interdiction de la marche, surtout dans les quartiers ouest de la ville (Ndosho), mais ils ont été dispersés par la police. Selon les sources des services de sécurité, au cours des échauffourées entre les manifestants et les policiers, une personne a été tuée et huit autres blessées, dont quatre civils et quatre policiers. Julien Paluku, gouverneur de la province du Nord-Kivu, a confirmé la mort d’un civil qui tentait, selon lui, de «ravir l’arme d’un policier de garde» devant une coopérative financière locale. Au moins 32 personnes, la plupart des jeunes gens, ont été interpellées et se trouveraient dans les différents cachots de la police.

À Bukavu (Sud-Kivu), par contre, la marche s’est bien déroulée, dans un climat apaisé et loin de toute répression.[11]

Le 30 mai, le procès des sept membres de l’opposition politique arrêtés à Matadi, a repris dans cette même ville. Ces opposants, détenus au camp Molayi, sont poursuivis par le parquet général du Kongo-Central pour «avoir préparé des tracts appelant la population aux soulèvements». La défense a rejeté ces accusations et a parlé d’un procès politique. Allégations rejetées par le ministère public, qui assure que les preuves et les faits de culpabilité seront établis, sans donner des détails. Les prévenus sont membres des partis politiques UNC, MPCR et RECO. Sur neuf opposants arrêtés le 23 mai, deux ont été libérés.[12]

2. LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE CONDAMNE TOUTE RÉPRESSION

Le 13 mai, à Kinshasa, l’envoyée spéciale de la Grande-Bretagne pour la région des Grands Lacs, Danae Dholakia, a déclaré que Londres et ses partenaires européens envisagent des «sanctions ciblées» contre des responsables «d’actes de répression» politique en République Démocratique du Congo. L’émissaire britannique a fait référence aux récents ennuis judiciaires de l’opposant Moïse Katumbi, candidat déclaré à la présidentielle et visé depuis une dizaine de jours par une enquête pour «recrutement de mercenaires». «J’espère sincèrement que les récentes accusations portées contre Moïse Katumbi ne constituent pas un «resserrement de l’espace politique», a encore dit Mme Dholakia, ajoutant que «les risques de s’écarter de l’ordre constitutionnel sont réels». Elle a expliqué que «l’émission d’un mandat d’arrêt provisoire contre Moïse Katumbi semble faire partie d’une campagne croissante d’intimidation des opposants politiques».[13]

Le 21 mai, l’Ambassade des USA à Kinshasa a publié une déclaration du porte-parole adjoint du département d’Etat américain, Mark Toner. D’après ce document, la situation politique pré-dialogue qui prévaut en RDCongo inquiète très sérieusement les Etats-Unis d’Amérique. Mark Toner affirme que les Etats-Unis d’Amérique sont préoccupés par la multiplication des intimidations et des cas de harcèlement et de détention des membres de l’opposition et des leaders de la société civile. Pour lui, «un gouvernement ne peut appeler au dialogue entre les parties prenantes tout en harcelant, arrêtant et emprisonnant simultanément les personnes appelées à y participer» Toujours d’après cette déclaration du porte-parole adjoint du département d’Etats-Unis, Mark Toner, «le gouvernement de la RDC a l’obligation positive de protéger tous les droits des citoyens, inclus ceux de participer à la conduite des affaires publiques et d’exercer leur droit de s’exprimer librement et de se rassembler pacifiquement». De ce fait, Mark Toner indique que «les Etats Unis étudient la possibilité d’appliquer des sanctions en réponse à ce schéma croissant de l’oppression en RDC».[14]

Le 21 mai, le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies en RDC, Maman Sidikou, s’est dit «profondément préoccupé par les tensions politiques croissantes» dans le pays. Dans un communiqué, il a estimé que ces tensions risquent de compliquer la tenue du dialogue politique, censé baliser le chemin des élections. Selon lui, «la multiplication des procédures judiciaires ainsi que tous autres actes ayant pour effet de rétrécir l’espace politique, ne feront qu’exacerber ces tensions et rendre encore plus difficile la tenue du dialogue politique que le Président de la République appelle de ses vœux». Il en a donc appelé au respect scrupuleux de l’Etat de droit et des libertés fondamentales garanties par la Constitution congolaise.[15]

Le 23 mai, à l’issue d’une réunion du conseil des Affaires étrangères consacrée à la situation qui prévaut en RDC, l’Union Européenne (UE) «a exprimé sa préoccupation quant aux entraves au débat politique en RDC, comme en témoignent les événements récents, notamment à Lubumbashi, Goma et Kinshasa. Face aux rapports faisant état d’actes de harcèlements et d’intimidations en nombre croissant visant des responsables politiques, des professionnels des médias et des membres de la Société civile, y compris des défenseurs des droits de l’Homme, l’UE a rappelé qu’en cette période préélectorale, le respect des droits de l’Homme, notamment des libertés publiques, et la préservation d’un espace politique ouvert est crucial et constitue une condition préalable à la tenue d’un dialogue réel et crédible. Dans cette perspective, l’UE a souligné l’importance pour le gouvernement de la RDC de respecter ses engagements dans ce domaine, conformément à la Constitution et aux accords que la République démocratique du Congo a ratifiés, y compris les conventions internationales en matière de droits de l’Homme et l’accord de Cotonou. L’UE a rappelé la responsabilité individuelle de tous les acteurs, y compris celle des responsables des institutions chargées de la justice et de la sécurité, d’agir dans le strict respect de l’État de droit et des droits de l’Homme, faute de quoi ils auraient à en assumer les conséquences».[16]

Le 24 mai, en rappelant la hausse des « violations des droits de l’Homme liées à l’exercice des libertés d’expression, de réunion pacifique et d’association » documentées par l’ONU depuis le début de l’année, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) s’est dit préoccupé face à « la pression exercée sur l’opposition et la société civile« . Le HCDH a exprimé sa préoccupation concernant «une série de mesures prises par le gouvernement de la RDC depuis janvier 2015 pour réduire l’espace démocratique dans le pays avant les élections».

«Compte tenu du climat inquiétant, nous demandons au gouvernement d’autoriser le déroulement de manifestations pacifiques et de veiller à ce que les forces de l’ordre n’aient pas recours à un usage inutile ou excessif de la force lors de ces manifestations», a déclaré le porte-parole du HCDH, Rupert Colville, lors d’un point de presse à Genève.

Le HCDH a également demandé aux autorités congolaises d’engager un dialogue constructif avec l’opposition et de veiller à ce que les droits de tous les Congolais à participer aux affaires publiques de leur pays soient respectés, plutôt que de chercher à supprimer la dissidence.

Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, s’est pour sa part déclaré profondément préoccupé par les informations faisant état de tensions politiques grandissantes en République démocratique du Congo en lien avec l’incertitude qui persiste autour du processus électoral.

«Le Secrétaire général appelle au strict respect des libertés et droits fondamentaux consacrés par la Constitution. Il exhorte toutes les parties à faire preuve de retenue et à exprimer leurs opinions pacifiquement», a dit son porte-parole dans une déclaration à la presse.[17]

[1] Cf Radio Okapi, 15.05.’16

[2] Cf Radio Okapi, 20.05.’16 ; RFI, 20.05.’16

[3] Cf Radio Okapi, 26.05.’16

[4] Cf Laure Broulard et Trésor Kibangula – Jeune Afrique, 20.05.’16

[5] Cf Radio Okapi, 21 et 22.05.’16

[6] Cf Radio Okapi, 15.05.’16

[7] Cf RFI, 24.05.’16

[8] Cf Radio Okapi, 24.05.’16

[9] Cf RFI, 24.05.’16; Radio Okapi, 25.05.’16;

[10] Cf Radio Okapi, 25.05.’16; RFI, 26.05.’16

[11] Cf Radio Okapi, 26.05.’16 ; RFI, 26.05.’16; Trésor Kibangula – Jeune Afrique, 26.05.’16

[12] Cf Radio Okapi, 31.05.’16

[13] Cf Radio Okapi, 13.05.’16

[14] Cf Radio Okapi, 21.05.’16

[15] Cf Radio Okapi, 21.05.’16

[16] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 24.05.’16

 http://www.lepotentielonline.com/index.php?option=com_content&view=article&id=14537:kinshasa-dans-le-collimateur-de-l-union-europeenne&catid=85&Itemid=472

[17] Cf Radio Okapi, 26.05.’16